TÉMOIGNAGES - Ce mardi, la Fondation Abbé Pierre a rendu public son rapport 2018 sur le mal-logement, qui met l'accent sur le surpeuplement, un phénomène dont près de 8,6 millions de personnes sont victimes. Rencontres avec Rachida, Sarata, Fatma et Rabat, quotidiennement confrontés à cette situation.
Rachida, Sarata et Fatma viennent régulièrement prendre conseil au Comité Actions Logement, situé 6, rue de la Goutte d’Or, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Toutes trois, à des degrés différents mais tout aussi préoccupants, font partie des 8,6 millions personnes touchées par une situation de surpeuplement en France, un phénomène sur lequel la Fondation Abbé Pierre alerte dans son rapport annuel sur le mal-logement rendu public ce mardi.
Pour Rachida et son mari, parents de trois enfants respectivement âgés de neuf, huit et deux ans et demi, la situation dure depuis bientôt huit ans. Locataires d’un appartement de 35m² déjà bien trop petit pour les accueillir, à proximité du métro Marx Dormoy, les cinq membres de la famille n’ont en réalité accès qu'à une partie de celui-ci : la chambre est condamnée à cause des punaises qui y prolifèrent.
Cela fait plusieurs années que nous n’avons pas fêté l’anniversaire de ma fille.
Rachida, locataire d'un deux pièces avec son mari et ses trois enfants.
Si au départ Rachida était "plutôt contente" de ce logement social, malgré sa surface étriquée, elle a décidé en 2013 d’effectuer une demande pour en obtenir un autre, quand les murs et les sols ont commencé à sérieusement se dégrader, laissant place aux punaises mais également à la moisissure et l’humidité. Conséquence directe de l’état de l’appartement, la santé des enfants : "Mon fils de huit ans est asthmatique, et je pense que c’est directement lié à l’humidité et au mauvais état des murs. Ma fille aînée souffre elle aussi de quelques crises d’asthme, seulement après effort mais c’est malgré tout problématique", confie la mère de famille, qui avoue redouter des conséquences similaires pour son dernier enfant en bas âge.
Des craintes qui concernent également la sécurité, les installations électriques se désagrégeant en même temps que les murs. "À cet âge-là, il court partout et veut toucher à tout ce qu’il voit, notamment aux prises de courant mal fixées. C'est très dangereux", souligne-t-elle avant d’aborder les autres problèmes que pose cet appartement. "Cela fait plusieurs années que nous n’avons pas fêté l’anniversaire de ma fille. Elle n’ose pas inviter ses copines à la maison. Quant à mon fils, il nous demande pourquoi les personnes en bas de l’immeuble s’échangent de l’argent", référence au trafic de drogue qui sévit dans le quartier. Malgré un dossier de demande de nouveau logement déposé depuis maintenant cinq ans, Rachida a l’impression que "rien n’avance". "On fait du surplace", déplore-t-elle.
Nous avons postulé pour quatre appartements depuis notre demande et les refus se sont multipliés.
Rabat, 67 ans, locataire d'un studio de 15m² avec sa femme.
Pour Fatma et son mari Rabat, le constat est le même. Installé dans un studio de 15m² au troisième étage d'un immeuble proche du métro La Chapelle, rue Marx Dormoy, le couple de sexagénaires cherche désespérément à changer de logement depuis de longs mois. Arrivé en 1970 à Paris alors qu'il avait 20 ans, Rabat a longtemps vécu avec son frère avant d’être rejoint en 2015 par sa femme, restée en Algérie pour élever leurs enfants. A deux, ils doivent faire avec les 1 170 euros de retraite de Rabat, Fatma n’étant pas éligible à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), anciennement appelée minimum vieillesse, attribuée aux personnes vivant en France depuis au moins dix ans.
Un faible revenu pour un loyer de 550 euros. Rabat, atteint d’un lourd handicap au dos l’empêchant de se déplacer autrement qu’en fauteuil roulant, n’est quasiment pas sorti de son appartement depuis maintenant un an. "Ce n’est pas vivable, je me déplacement seulement en fauteuil roulant quand je dois me rendre à l’hôpital. Pire, je dois garder les roues de mon fauteuil chez moi de peur qu’on me les vole", explique-t-il, assis sur son lit, où il reste cloué toute la journée. Un lit d’une personne qu’il partage avec sa femme pour dormir, dans la seule pièce de l’appartement, trop petite pour accueillir une vraie table. "Je mange très souvent avec mon assiette sur les genoux", déplore Fatma, 62 ans.
Outre son dos, Rabat, qui a fait partie des victimes de la prise d'otages du vol Alger-Paris, en 1994, souffre également de séquelles psychologiques : "J’y pense tous les jours, je n’ai jamais oublié cette journée. Les médecins m’ont même dit que mon mal de dos était certainement dû à mon état psychologique." Considéré comme prioritaire dans l’attribution des logements DALO, le couple n’a pour le moment pas eobtenu le droit de déménager, malgré une demande déposée il y a plus de deux ans pour un appartement dans le XIIIe arrondissement de Paris. "Nous avons postulé pour quatre appartements depuis notre demande, et les refus se sont multipliés. Nous ne demandons pas la Lune, juste plus de place et un étage accessible, soit avec ascenseur ou au rez-de-chaussée", commente Rabat.
A six dans un studio de 17m²
Pour Sarata en revanche, le calvaire est sur le point de s’achever. Depuis 2011 et jusqu’en décembre dernier, la jeune femme de 34 ans vivait dans un studio de 17m² à 400 euros par mois dans le XIXe arrondissement de Paris. Le tout avec ses cinq enfants, âgés respectivement de 12, 9, 8, 3 ans et 19 mois. Un cas de figure extrêmement compliqué à gérer pour ces derniers au quotidien. "Ils n’avaient pas de place pour faire leurs devoirs, je les ai donc inscrits au sein d’une association qui aide les enfants après l'école", explique-t-elle, déplorant également le fait de vivre, manger et dormir dans la même pièce.
En plus du trop petit espace, le logement s’avérait être en très mauvais état, à cause de l’humidité mais surtout de la forte présence de plomb, provoquant d’importants risques sanitaires pour la famille. D’ailleurs, coïncidence ou non, un des fils de Sarata est lui aussi asthmatique. Pendant près de deux mois, la mère de famille et ses cinq enfants ont donc été pris en charge par la mairie de Paris, qui les a logés à l’hôtel, faute de mieux.
Depuis 2014, la jeune femme, qui effectue des ménages en horaires décalés pour subvenir aux besoins de sa famille, avait déposé une demande de logement DALO pour bénéficier de plus d'espace. C’est finalement à la fin de ce mois de janvier que Sarata peut voir le bout du tunnel. Après plusieurs essais infructueux, la mère de famille s'est vue accorder un appartement de 4 pièces d’une superficie de 88m², proche de la Porte des Lilas. "Nous allons enfin pouvoir respirer", se réjouit-elle.
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