Menhirs détruits à Carnac pour construire un Mr. Bricolage : 5 questions pour comprendre la polémique

Publié le 8 juin 2023 à 15h40
JT Perso
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Source : JT 13h Semaine

Une quarantaine de petits menhirs ont été détruits récemment à Carnac, ce qui a provoqué de vives réactions.
Ces derniers ont en effet depuis laissé place à un magasin Mr. Bricolage, en cours de construction.
Parmi les questions qui se posent figure celle du contexte dans lequel a pu être accordé un permis de construire à cet endroit.

Que s'est-il passé ? La question est sur toutes les lèvres depuis l'annonce de la destruction récente d'une quarantaine de petits menhirs situés à proximité des célèbres alignements de Carnac, dans le Morbihan, pour permettre la construction d'un magasin Mr. Bricolage.

Face à l'émoi suscité et alors que la polémique enfle, la commune comme la direction de l'enseigne assurent "regretter" cette situation, cette dernière soulignant qu'elle aurait fait autrement si elle "avait su". L’intérêt historique du site était pourtant connu depuis plusieurs années, et ce bien que sa valeur archéologique et patrimoniale réelle fasse aujourd'hui débat. La question du contexte dans lequel un permis de construire a pu être délivré à cet endroit demeure, elle, au centre de l'affaire.

Comment est née la polémique ?

C'est Christian Obeltz, passionné d'archéologie, qui a donné l’alerte le 2 juin, dans un billet de blog repéré par Ouest-France. Publié sur le site de l’association Sites & Monuments, consacrée au patrimoine historique et naturel, ce dernier dénonce "plusieurs aménagements brutaux réalisés, cet hiver et au printemps, aux abords des alignements de menhirs de Carnac, dénaturant ce site mondialement connu". 

L'archéologue amateur évoque alors la construction du magasin de bricolage, déjà sorti de terre et en cours d'achèvement. Les mégalithes, elles, ont disparu. "Le site est répertorié au projet d'inscription au patrimoine mondial de l'Unesco, ce qui oblige normalement à prévenir l'Architecte des bâtiments de France et la Direction régionale des Affaires culturelles (Drac) avant de lancer le projet", déplore-t-il.

Que sait-on de la valeur archéologique des pierres ?

La Direction régionale des Affaires culturelles (Drac) de Bretagne a mis en avant mercredi encore  "le caractère encore incertain et dans tous les cas non majeur" de la quarantaine de menhirs détruits récemment. Il s'agissait de vestiges trouvés en 2015 lors de fouilles préventives menées par l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), qui s'étaient achevées "sur un constat contradictoire". "Seules des observations complémentaires sur les monolithes, voire une fouille, permettraient de certifier l'origine néolithique de cet ensemble", détaille l'organisme dans son rapport publié en avril 2015. Le problème, pour Christian Obeltz, est qu'il "n'y a pas eu de fouilles archéologiques pour que l'on sache si les stèles étaient bien des menhirs ou non". Si la Drac avait prescrit une telle fouille sur les deux files de blocs de pierres mises au jour à l'époque, celle-ci n'a en effet jamais eu lieu.

Il n'en demeure pas moins que depuis 2015, le lieu est inscrit à l’Atlas des patrimoines, une plate-forme de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) qui référence l’ensemble des sites archéologiques du pays. 

Un manquement à la législation ?

Le maire de Carnac, Olivier Lepick, atteste avoir "parfaitement respecté la législation" et invoque "la faible valeur archéologique" des objets retrouvés lors des fouilles préventives. "Ce site n'était pas situé en zone de prescription archéologique obligatoire dans le plan local d'urbanisme", insiste-t-il.

"L'atteinte à un site ayant une valeur archéologique n’est pas établie", se défend de son côté la Drac, soulignant que le terrain sur lequel les pierres se trouvaient est considéré comme une "zone d'activité" par le plan local d'urbanisme (PLU). Il "n'est par ailleurs pas répertorié parmi les zones de présomption archéologique, c'est-à-dire les zones qui justifient un avis du service régional d'archéologie", ajoute-t-elle.

Comment un permis de construire a-t-il pu être délivré ?

"La Commission départementale d'aménagement commercial (Cdac) du Morbihan a donné son accord pour l'exploitation commerciale en janvier 2022", a précisé à Ouest-France la Direction de Mr. Bricolage. Le permis de construire, qui avait donc été refusé une première fois en 2015, a lui été délivré le 26 août 2022 par la mairie de Carnac. Mais pourquoi a-t-il été accepté huit ans après un premier refus ? Le précédent permis de construire avait été refusé, selon l'enseigne, non à cause des menhirs, mais pour une problématique de zone humide. Or, la commune de Carnac insiste auprès de Libé sur la conformité du deuxième dossier. "La mairie, pour délivrer un permis de construire, se base sur des documents et des avis sérieux : les architectes des bâtiments de France, la Drac, l’Unité départementale de l’architecture et du patrimoine (...) à notre niveau, l’avis que nous avons reçu était positif, donc le permis a été accordé".

Auprès de Ouest-France, le maire, Olivier Lepick, également président de Paysages des mégalithes, qui porte le dossier de candidature au patrimoine mondial de l’Unesco, précise également ne pas avoir été au courant que la zone était référencée. "Nous sommes extrêmement attentifs à ce genre de choses, nous regardons les zones de pré-inscription archéologique". Or, la Drac aurait placé le site en zone de prescription dans l’ancien Plan d’occupation des sols (POS), mais pas dans l’actuel Plan local d’urbanisme (PLU), selon la mairie.

Et après ?

Ce cafouillage mis au jour, une association de défense du patrimoine, Koun Breizh ("Mémoire bretonne", en breton), a annoncé avoir déposé une plainte contre X pour destructions volontaires aggravées car portant sur le patrimoine archéologique. "L'objectif de cette plainte n'est pas de mettre en cause tel ou tel élu mais d'éclairer le processus de décision qui a abouti à ces destructions malgré toutes les formes de protection prévues par la loi", a expliqué à l'AFP le président de l'association, Yvon Ollivier. "Il s'agit de faire en sorte que de tels faits ne se reproduisent plus", a-t-il ajouté. 

"La loi est formelle : toute destruction d’un site archéologique est passible d’une lourde amende", rappelle Christian Obeltz qui avait déjà alerté la Drac en 2013 concernant un précédent permis de construire, ce qui avait abouti au déplacement de la maison concernée.


Audrey LE GUELLEC

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