REPORTAGE - Le Conseil des ministres se penche mercredi sur le projet de loi sur l'asile et l'immigration, un texte très critiqué par les associations d'aide aux migrants. Nous sommes allés à la rencontre de ceux qui seront directement concernés par ces mesures.
Il ne fait que deux petits degrés à Paris ce matin-là. Ils sont pourtant des dizaines à faire la queue devant la Pada (plateforme d’accueil des demandeurs d’asile), boulevard de la Villette. C'est là que, dès son arrivée sur le sol français, un demandeur d'asile doit se présenter pour se voir délivrer un rendez-vous en préfecture où sa demande sera étudiée.
Aman dort devant le bâtiment aux grandes vitres rectangulaires depuis maintenant trois jours, mais n’est toujours pas entré. "J'étais dans la rue et on m'a dit de venir ici, confie cet Erythréen de 22 ans, les mains bleuies par le froid. C'est mon dernier espoir". Quand on lui demande s'il sait pourquoi il est là, sa réponse est simple, sans détails : "Pour travailler en France". Il ne sait en revanche rien des démarches administratives de la demande d'asile, des délais d'attente à rallonge, de la loi de Dublin ou des centres de rétention administrative.
Je suis dans la rue depuis trois semaines alors je ne suis plus à un jour près
Rajesh, 29 ans

"On leur dit de venir ici, mais ils n'ont aucune idée de ce qui les attend", souffle Désiré, fondateur de l'Association des futuristes de Paris, qui vient distribuer le petit déjeuner tous les matins devant la Pada. Ils ne ressentent même plus la fatigue ou le froid, leur espoir les réchauffe".
Parmi les hommes dans la file d'attente se trouve Rajesh, 29 ans. Il est arrivé ici la veille après avoir quitté sa famille au Tchad pour venir travailler en France. Il sait qu'il risque d'attendre plusieurs jours devant le bâtiment. "Je suis dans la rue depuis trois semaines alors je ne suis plus à un jour près, explique le jeune homme dans un français hésitant, la voix tremblante. J'ai ma couverture et il y a de la nourriture le matin alors ça devrait aller".
Malheureusement pour Rajesh, ses empreintes ont été prises en Italie après un passage par la Libye et une traversée à haut risque de la Méditerranée. Le règlement Dublin stipule qu'un migrant doit demander l'asile dans le pays européen où il a été enregistré pour la première fois. Il n'a pas l'intention de retourner là-bas pour autant. "J'ai des amis à Paris, je parle un peu français et je peux trouver un travail plus facilement", assure-t-il.
Des mesures jugées sévères
La loi asile et immigration, présentée ce mercredi en conseil des ministres, pourrait pourtant compliquer les choses pour ces milliers de demandeurs d'asile. Le "projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif" vise à réduire à six mois les délais d'instruction de la demande d'asile, à faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés et lance des pistes pour mieux intégrer les personnes admises sur le territoire, assure le gouvernement.
Mesure-phare du texte pour faciliter les expulsions, le doublement de la durée maximale de rétention de 45 à 90 jours (voire 135 en cas d'obstruction) est vigoureusement dénoncé par les associations. "On sait depuis des années que la durée de rétention influe très peu sur les mesures exécutées", assure David Rohi de la Cimade, association d'aide aux étrangers, qui demande le retrait du texte.
Pierre Henry, directeur général de l'association France Terre d'Asile, dénonce de son côté un "message de dissuasion adressé aux migrants parfaitement inutile et punitif". "90% des d'entre eux sont éloignés au bout de 12 jours parce que en situation irrégulière, assure-t-il. On ne fait pas une loi pour 10% des personnes, surtout aux vues de conditions dans lesquelles se trouvent aujourd'hui les centres de rétention - saturés et en mauvais état -.
L'information dans une langue comprise par les personnes est absolument essentielle"
Pierre Henry, DG de France Terre d'Asile
D'autres mesures sont aussi critiquées, notamment celles qui, au nom de la réduction des délais d'instruction, restreignent les possibilités de recours. "Ces mesures concourent en réalité à dissuader les demandes considérées a priori comme dilatoires", estime le Gisti ("Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s"). Signe de leur inquiétude vis-à-vis de la future loi sur l'immigration, plusieurs acteurs de l'asile pourraient être en grève mercredi, notamment à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) et à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA).
Des annonces bien loin des réalités vécues par les migrants, qui ne connaissent, pour la plupart, que peu de choses de la loi actuelle sur l'immigration en France. "L'information dans une langue comprise par les personnes est absolument essentielle", abonde Pierre Henry. Il propose d'ailleurs de créer des 'centres de transit' dans toutes les grandes capitales régionales pour mettre à l'abri, orienter et mieux informer.
Malgré les difficultés annoncées, Rajesh n'entend pas baisser les bras pour autant et espère voir sa demande d'asile instruite en France. "Je ne sens même plus la fatigue ou le froid, confie-t-il du haut de son mètre 80, sourire en coin. Ce qui me fait tenir, c'est l'espoir".
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