Notre-Dame : les travaux dans les monuments nationaux, des procédures en principe très encadrées

par Cédric STANGHELLINI
Publié le 17 avril 2019 à 18h48
Notre-Dame : les travaux dans les monuments nationaux, des procédures en principe très encadrées
Source : Philippe LOPEZ / AFP

NOTRE-DAME - L'incendie de la cathédrale interroge : est-ce que tous les dispositifs de prévention contre les incendies en cas de travaux ont été respectés ? Notre-Dame était en chantier depuis juillet 2018 afin de restaurer des sculptures et changer entièrement la couverture de plomb de la flèche.

C'est au moment des travaux que les monuments sont les plus vulnérables. Les exemples ne manquent pas. En 2015, la quasi-totalité de la toiture de la basilique Saint-Donatien à Nantes a été détruite à cause d’une soudure. En 1972, c'est le toit de la cathédrale de Nantes qui parti en fumée à cause d'un chalumeau resté allumé. En 2008, ce sont les hospices de Beaune qui ont failli disparaître pour des travaux similaires. Pourtant, les entreprises qui interviennent doivent respecter des procédures très strictes, dont une demande dite de "permis de feu".  

Le permis de feu obligatoire

Lorsqu'une entreprise intervient sur ce type de construction, et en particulier quand les artisans doivent effectuer des soudures, les procédures sont extrêmement strictes. "Nous devons demander un 'permis de feu', qui peut-être accorder à la semaine ou même à la journée dans certaines situations", explique à LCI Fabrice Merlot, co-dirigeant de l'entreprise Merlot, spécialisée dans les travaux de restauration et de rénovation des charpentes et couvertures de monuments historiques. Il a notamment participé à la restauration de la cathédrale de Tours et du château des Ducs de Bretagne à Nantes. 

Le permis de feu détaille les points chauds qui seront effectués pendant les travaux, par exemple une découpe au chalumeau, ainsi que les moyens mis en oeuvre pour empêcher tout risque d'incendie. Sur ce type de chantier, l'entreprise prévoit le matériel de lutte contre les incendies comme des bacs de sables, de l'eau ou des couvertures ignifugées. Dans tous les cas, Fabrice Merlot précise que les couvreurs réalisent le moins possible de soudures sur le toit, l'essentiel des interventions étant effectué en atelier ou au pied du chantier.

Le permis de feu est validé par l'architecte et le coordinateur des travaux. Un tel permis est obligatoire dans les établissements relevant du ministère de la Culture, comme c'est le cas pour la cathédrale Notre-Dame de Paris. 

Des dispositifs très contrôlés

S'agissant de l'incendie qui a frappé Notre-Dame de Paris, "tous les gens du métier sont interpellés, nous n'arrivons pas à comprendre comment cela est-il possible," nous confie Fabrice Merlot. Il comprend d'autant plus mal les événements de Notre-Dame que son entreprise a l'habitude d'intervenir sur des sites délicats, comme en 2015 sur le toit de la gare historique de Tours. "Le chantier était contrôlé tous les jours après le départ des ouvriers. Nous devions retranscrire tout ce que nous avions effectué dans la journée, et nous devions arrêter tous les points chauds deux heures avant le départ des artisans du chantier." 

Contacté par LCI, Jean D'Haussonville, président-directeur général du domaine national de Chambord, nous confirme que les procédures en cas de travaux sont très précises. Le château a connu d'importants travaux de réfection des toitures dernièrement. "Les travaux devaient s'arrêter à 16h30 et des rondes étaient effectuées jusqu'à 2 heures après l'arrêt des interventions." L’objectif : surveiller les fameux points chauds et s'assurer qu'il n'y a aucun risque de départ de feu au niveau de la charpente. Il rappelle que "70% des incendies ont lieu pendant des travaux", toute l'attention des professionnels devant être concentrée sur ce risque pour éviter les conséquences dramatiques que la cathédrale de Paris a connues lundi.   

Questionnements sur le protocole

Maxime Cumunel, secrétaire général de l'Observatoire du patrimoine religieux, émet des doutes concernant les protocoles appliqués à l'occasion des travaux de la flèche. S'exprimant sur l'antenne de LCI le mercredi 17 avril, il a estimé que "soit les procédures ont été insuffisantes, soit leur application n'étaient pas respectueuses des procédures telles qu'elles existaient. [...] Il faut que le ministère de la culture engage une réflexion sur des procédures qui soient beaucoup plus rigoureuses." 

Pour l'heure, l'enquête relative à Notre-Dame de Paris est loin d'avoir abouti. Si l'on sait que l'incendie s'est déclaré à la base de la flèche, les causes restent pour l'heure inconnues. 


Cédric STANGHELLINI

Tout
TF1 Info