La colère des Gilets jaunes

Les Gilets jaunes rêvent de rallumer l'incendie

Maëlane Loaëc avec Felicia Sideris
Publié le 4 janvier 2023 à 17h58, mis à jour le 7 janvier 2023 à 7h21
JT Perso

Source : JT 20h Semaine

Sur les réseaux sociaux, des appels à la mobilisation circulent pour ce samedi 7 janvier et promettent le "retour de tous les Gilets jaunes".
Deux manifestations ont été déclarées en préfecture pour Paris.
Mais il est peu probable que le mouvement rencontre encore un large écho.

Près de quatre ans après le départ de l’étincelle, la flamme des Gilets jaunes peut-elle être ravivée ce samedi 7 janvier ? C’est en tout cas ce qu’annoncent plusieurs appels à manifester, dans la capitale en priorité mais aussi "partout en France", relayés sur les réseaux sociaux sous une large bannière de revendications : "Retraites, 49-3, Inflation, Énergie, Carburant". Mais malgré un contexte inflammable en ce début d’année, notamment au sujet de la réforme des retraites, ils ne semblent pas pour l’heure particulièrement suivis. 

Ce mouvement contestataire, né de la protestation contre le prix des carburants à l'automne 2018, a déjà déclaré deux manifestations en préfecture à Paris ce samedi. L’une par le collectif Gilets jaunes à 11h place de Breteuil dans le 7e arrondissement, l'autre qui partira à 14h30 en direction de la place du Bataillon du Pacifique dans le 12e. Un autre collectif, "Vigi Média", appelle quant à lui à manifester à partir du siège de France-Soir, un média en ligne accusé de relayer des thèses complotistes, pour aller jusqu’aux locaux du Monde, qu’il décrit comme "le temple de la propagande". La police prépare déjà ses dispositifs et communiquera à ce sujet vendredi matin.

Un mouvement toujours présent mais qui s'essouffle

Mais pour l’heure, seules 673 personnes ont répondu à l'appel lancé par l’évènement Facebook dédié à la manifestation, dont tout juste 155 prêtes à participer. Plusieurs pages tentent d’organiser la mobilisation, notamment le covoiturage et l'hébergement. Le créateur de l'évènement, un certain Lucas Déter, fervent défenseur du mouvement, n’est pas lié aux figures historiques des Gilets jaunes et le groupe public qui en a fait la promotion rassemble huit fois moins que celui, historique, des Gilets jaunes de Lille par exemple.  

On est semble-t-il encore loin de la déferlante que la France a connu. "Depuis l'automne 2018, les Gilets jaunes n'ont jamais complètement disparu, mais ils n'ont pas pour autant réussi à relancer le mouvement comme au départ", analyse pour TF1info Stéphane Sirot, historien spécialiste des syndicats et mouvements sociaux. Il relève leur présence lors de manifestations contre une première tentative de réforme des retraites à l'hiver 2019-2020 et lors de mobilisations anti pass sanitaire. Mais en novembre dernier, pour les quatre ans du mouvement, seules quelques centaines de personnes défilaient à Paris.

Sans compter que le gouvernement chercherait, selon le spécialiste, à désamorcer toute reprise de la contestation, en maintenant des aides ciblées pour soutenir face à l'inflation les faibles revenus et les personnes vivant en territoire rural, "ce qui correspond très largement aux catégories de personnes présentes sur les ronds-points en 2018"

Front désuni

De plus, le front est loin d'être uni au sein des Gilets jaunes : plusieurs figures historiques du mouvement ont relayé l’évènement, dont Jérôme Rodrigues ou Mike Rambo, mais certaines le font avec réserve. Sur Facebook, Maxime Nicolle, aussi appelé Fly Rider, affirme qu’il se rendra sur place sans pour autant lancer "d'appel" plus clair à rallier la mobilisation, prédisant des violences. "Je trouve que c’est une erreur de retourner à Paris, je me tue à le dire mais personne ne m’écoute. Le mécontentement, il faut l’exprimer dans les régions", a jugé de son côté Jacline Mouraud mercredi sur CNews. 

Rien d'étonnant pour Stéphane Sirot : "Le mouvement n'a jamais eu de leader véritable" mais s'organise plutôt comme un tout "éclaté et disparate". Leurs revendications, elles, s'étalent désormais en un "catalogue fourre-tout", là où les Gilets jaunes avaient rassemblé massivement en 2018 en brandissant au départ l'objectif concret de l'annulation de la taxe carbone.

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Face à cette nébuleuse, les syndicats semblent les plus à même de mobiliser et de donner le tempo en ce mois de janvier qui s'annonce tendu dans la rue. À l'inverse des Gilets jaunes, ils se concentrent uniquement sur la réforme des retraites, "sujet social majeur sur lequel ils gardent la main". Certes, ces organisations sont davantage concurrencées aujourd'hui, comme l'ont montré par exemple l'existence d'un collectif de contrôleurs de train impliqué lors de récentes grèves à la SNCF. "Mais ces mouvements sont épidermiques et défensifs, et dès lors qu'il faut traduire le mécontentement par des demandes plus offensives et aboutir à quelque chose, on s’en remet aux organisations", explique Stéphane Sirot. 

Les Gilets jaunes eux-mêmes seraient susceptibles de se fondre dans les manifestations lancées à l'appel des syndicats contre la réforme des retraites, une bannière capable de "cristalliser la colère populaire et d'agglomérer plusieurs mécontentements".


Maëlane Loaëc avec Felicia Sideris

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