Pédocriminalité dans l'Église : 216.000 victimes de clercs ou religieux depuis 1950, selon le rapport Sauvé

Publié le 5 octobre 2021 à 10h01, mis à jour le 5 octobre 2021 à 13h18

Source : TF1 Info

RAPPORT - Selon la Commission d'enquête sur les abus sexuels dans l'Église catholique, présidée par Jean-Marc Sauvé, 216.000 personnes ont été victimes de clercs ou de religieux depuis 1950. Un nombre qui monte à "330.000 si l'on ajoute les agresseurs laïcs".

Le rapport tant attendu a livré ses conclusions. Selon la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église catholique (Ciase), présidée par Jean-Marc Sauvé, entre 1950 et 2020, 216.000 personnes de plus de 18 ans ont été victimes, pendant leur minorité, de clercs ou de religieux en France.

Le nombre de victimes grimpe à "330.000 si l'on ajoute les agresseurs laïcs travaillant dans des institutions de l'Église catholique" (aumôneries, enseignants dans les écoles catholiques, mouvements de jeunesse), a ajouté Jean-Marc Sauvé en rendant publiques devant la presse les conclusions de la commission, dénonçant "l'indifférence profonde et même cruelle" de l'Église catholique à l'égard des victimes jusqu'au début 2000.

La commission propose de "reconnaître la responsabilité de l'Église"

"Ces nombres sont bien plus que préoccupants, ils sont accablants et ne peuvent en aucun cas rester sans suite", a-t-il commenté (voir vidéo en tête de cet article). Les chiffres cités résultent d'une estimation statistique comprenant une marge de plus ou moins 50.000 personnes. Selon Jean-Marc Sauvé, "80% des victimes sont des garçons âgés de 10 à 13 ans", et "56% des agressions se sont déroulées entre 1950 et 1969".

De 1950 aux années 2000, "les victimes ne sont pas crues, entendues, on considère qu'elles ont peu ou prou contribué à ce qui leur est arrivé", a poursuivi Jean-Marc Sauvé. La commission propose de "reconnaître la responsabilité de l'Église dans ce qui s'est passé depuis les origines".

Elle estime aussi que les "silences" et les "défaillances" de l'Église catholique face aux actes de pédocriminalité commis en son sein depuis les années 1950 présentent un "caractère systémique". "La commission a longuement délibéré et elle est parvenue à une conclusion unanime : l'Église n'a pas su voir, n'a pas su entendre, n'a pas su capter les signaux faibles", a déclaré le président de la Ciase.

Il recommande désormais une "réparation" financière pour les victimes. "Il faut indemniser les préjudices subis par les victimes en dehors même de toute faute identifiée, caractérisée de l'Église", a demandé Jean-Marc Sauvé, en souhaitant que cette indemnisation ne soit pas considérée comme "un don" mais "un dû" de l'Église.

En outre, la commission préconise de clarifier les missions, les compétences et la place des cellules d'écoute à destination des victimes mises en place dans les diocèses depuis 2016. Elle recommande de faire appel "uniquement à des laïcs spécialement formés", en contact avec des professionnels de l'aide aux victimes, et de vérifier systématiquement les antécédents judiciaires de toute personne - clerc, religieux ou laïc - que l'Église mandate ou affecte auprès de mineurs ou de personnes vulnérables.

Le président de la Conférence des évêques exprime "son effroi" et demande "pardon"

Après la publication de ce rapport, Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, a exprimé "sa honte et son effroi" et demande "pardon à chacun et à chacune". La voix des victimes "nous bouleverse, leur nombre nous accable", a-t-il déclaré. "Il dépasse ce que nous pouvions supposer."

"Que tant de vies d'enfants et de jeunes aient pu être abîmées sans que presque rien en ait été repéré, dénoncé, accompagné, soigné, est proprement insupportable", a-t-il poursuivi. "J'exprime ma détermination à agir pour que le refus de voir, d'entendre, la volonté de cacher les faits, la réticence à les dénoncer, disparaissent des attitudes des autorités ecclésiales, des prêtres et des acteurs pastoraux, de tous les fidèles."


La rédaction de TF1info

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