Pourquoi Elisabeth Badinter a provoqué un clash à l'Observatoire de la Laïcité

Publié le 12 janvier 2016 à 16h31
Pourquoi Elisabeth Badinter a provoqué un clash à l'Observatoire de la Laïcité

POLÉMIQUE - Une interview d'Elisabeth Badinter, la semaine dernière sur France Inter, dans laquelle elle appelait à en finir, quitte à devoir assumer les accusations d'islamophobie, avec le politiquement correct pour défendre la laïcité, sème la zizanie au sein de l'Observatoire chargé de veiller au respect de ce principe. Sollicité par metronews, Nicolas Cadène, le rapporteur général contesté de l'institution, répond à la polémique.

L'affaire a suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux. Elle débouche sur une crise ouverte au sein de l'Observatoire de la laïcité. Trois membres de cette instance rattachée aux services du Premier ministre, le député PS Jean Glavany, l'ancien Grand maître du Grand Orient de France Patrick Kessel et la sénatrice PRG Françoise Laborde, ont dégainé lundi soir un communiqué au vitriol annonçant la suspension de leur participation à ses travaux. Et ce tant que son rapporteur général, Nicolas Cadène, qualifié de "petit Monsieur" qui s'est attaqué à "une grande dame", Elisabeth Badinter en l'occurrence, ne se sera pas "excusé ou qu'il n'aura pas été désavoué".

"On a peur de se faire traiter d'islamophobe"

La cause du courroux de ces partisans d'une application stricte de la laïcité, qui avaient déjà largement pris leurs distances avec l'Observatoire ces derniers mois (ils ont récemment accusé l'instance "d' éluder les problèmes dans l'enseignement supérieur ") : un tweet que Nicolas Cadène avait envoyé mercredi dernier pour épingler une interview sur France Inter  d'Elisabeth Badinter. 

Dans cette interview, la philosophe appelait à oser défendre la laïcité et à s'attaquer au racisme sous toutes ses formes, sans céder au politiquement correct. Les médias ont en particulier retenu une phrase choc : "Il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d'islamophobe". "On ferme le bec de toute discussion sur l'islam en particulier ou d'autres religions avec la condamnation absolue que personne ne supporte : 'Vous êtes raciste ou vous êtes islamophobe, taisez-vous !' Et c'est cela que les gens ne supportent plus : la peur, pour des gens de bonne foi, qu'on puisse penser que vous êtes raciste ou anti-musulman fait que vous vous taisez. C'est la meilleure arme qu'on pouvait trouver à l'égard des gens de bonne foi", développait notamment ensuite la partisane d'une conception dure de la laïcité (elle avait déjà fait polémique en 2011 après avoir déclaré, de manière ironique et amère, que Marine Le Pen était la seule à défendre cette notion).

"Des propos qui ne sont pas conformes au droit"

Joint par metronews, Nicolas Cadène nous explique que ce n'était pas ces propos en particulier qu'il visait dans son tweet, même s'il a également posté un message soulignant que l'on pouvait parfaitement défendre la laïcité sans se faire traiter d'islamophobe, "si on reste respectueux". "Elisabeth Badinter a le droit d'avoir les opinions qu'elle souhaite, nous déclare-t-il. Mais elle a tenu dans cette interview des propos qui ne sont pas conformes au droit, en disant par exemple que la laïcité, c'est la neutralité dans l'espace public, ce qui n'est pas exact puisque cette neutralité ne s'impose qu'aux agents de l'Etat."

Le rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité, qui a reçu mardi sur Twitter le soutien du président de l'instance, Jean-Louis Bianco – l'ancien secrétaire général de l'Elysée a dénoncé le "communiqué mensonger, dérisoire, risible et inacceptable" de Jean Glavany, Françoise Laborde et Patrick Kessel -, refuse toutefois "d'alimenter la polémique". "Le débat peut être légitime, mais dès lors qu'il n'y a pas d'invectives et d'insultes", lance-t-il alors qu'il a par ailleurs dénoncé mardi, toujours sur Twitter , la "chasse à l'homme" dont il dit faire l'objet de la part "de gens qui osent se dire 'laïques'", mais aussi des "identitaires FN" qui l'ont ciblé ces derniers jours sur les réseaux sociaux.

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Gilles DANIEL

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