À LA LOUPE – Si vous vivez à proximité d'une centrale nucléaire, vous êtes très certainement concerné par cette mesure. A partir du mois de septembre, tous les Français qui habitent à moins de 20 km d'une installation nucléaire - contre 10 km auparavant - seront invités à se procurer des comprimés d'iode stable et recevront des consignes de sécurité. Pour quelle raison cette disposition a-t-elle été prise ?
En septembre prochain, toutes les personnes qui vivent dans un périmètre de 10 à 20 kilomètres autour d'une centrale nucléaire recevront un courrier détaillant les consignes de sécurité à respecter en cas d'incident. Cette lettre sera également accompagnée d'un coupon leur permettant de retirer des comprimés à base d'iode en pharmacie. Cette mesure, annoncée par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), concerne 2,2 millions de Français, répartis sur 1.063 communes.
Une décision qui interpelle. Auparavant, le périmètre de distribution d'iode concernait seulement les riverains des centrales situés jusqu'à 10 kilomètres. Il a donc été doublé. Pour les pourfendeurs de l'énergie atomique, ce doublement du périmètre est le signe de l'inquiétude des autorités concernant l'état du parc nucléaire français. A la loupe fait le point sur cette décision.
A quoi servira cette distribution plus importante d'iode ?
La distribution de comprimés d'iode - plus précisément d'iodure de potassium - vise à prévenir les risques pour la population riveraine des centrales nucléaires. En cas d'incident, et s'ils sont pris à temps, les comprimés d'iodure de potassium empêchent la concentration dans la thyroïde de l'iode radioactif inhalé par l'organisme. Tout simplement, la thyroïde étant comme 'saturée' en iode, elle n'assimilera pas l'iode radioactif présent dans l'environnement contaminé.
Cette distribution est prévue dans le cadre des PPI, les Plans particuliers d'intervention, qui détaillent l'ensemble des mesures à appliquer en cas de catastrophe technologique. Chacune des 19 centrales que compte la France dispose de son propre PPI. La décision de doubler le périmètre de distribution a été prise il y a plus de trois ans par Ségolène Royal. Alors ministre de l'Environnement, elle fît cette annonce en avril 2016, lors du trentième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl, et cinq après celle de Fukushima. La ministre alignait la France sur les recommandations des Autorités européennes de sûreté nucléaire et de radioprotection qui préconisaient un périmètre plus large.
Il s'agit d'une mesure de prévention renforcée afin d'"organiser au mieux la réponse des pouvoirs publics ainsi que sensibiliser et préparer la population à réagir en cas d'alerte nucléaire", avait indiqué l'ASN dans un communiqué. "Ce que l'on souhaite, c'est pouvoir faire progresser la conscience du risque dans l'opinion publique, en tout cas pour les populations qui vivent à côté des centrales nucléaires. Il y a des choses à faire, il y a des choses à connaître et il y a des principes à mettre en place", avait également indiqué, à l'époque, Alain Delmestre, le directeur général adjoint de l'ASN.
La première campagne distribution de comprimés d'iode en France remonte à 1997. Puis, la distribution a été renouvelée régulièrement, en 2000, 2005 et 2009, en raison de la péremption des comprimés. La dernière campagne a eu lieu en février 2016 et les habitants des 500 communes ont reçu un courrier les invitant à retirer gratuitement leurs boîtes de comprimés dans une pharmacie agréée. Ainsi, c'est la même procédure qui sera mise en place dès septembre 2019 pour les personnes vivant entre 10 et 20 km d'une centrale. Les comprimés des habitants situés dans le périmètre de 0 à 10 km seront, eux, renouvelés en 2023, ce qui représente plus d'1 million de Français répartis sur environ 500 communes.
Contactée par LCI, l'ASN assure qu'un peu plus de la moitié des personnes concernées retirent finalement leurs comprimés. "Nous relançons alors plusieurs fois par courrier tout ceux qui ne les ont pas récupéré en pharmacie." Et dans le cas où vous habiteriez dans le périmètre sans pour autant avoir reçu les informations l'ASN, "il est possible de se présenter en pharmacie avec son justificatif de domicile. Mais les courriers pour le périmètre 10 à 20 kilomètres ne seront pas adressés avant septembre prochaine."
Quelles mesures complémentaires en cas d'incident ?
La prise de comprimés d'iode ne prémunit en rien contre les conséquences d'un incident nucléaire. Si l'iodure de potassium protège de l'iode radioactif, il n'a aucune action contre les irradiations externes qui affectent tout le corps et les voies respiratoires. Voilà pourquoi d'autres mesures de protection seront communiquées en septembre dans les courriers adressés aux Français vivant dans le périmètre des 20 kilomètres. Parmi ces consignes, il sera expliqué comment se confiner, éviter tous les déplacements et suivre les mesures de sécurité transmises par les autorités.
Mais comment seront traitées les personnes qui vivent au-delà des 20 kilomètres ? Sur ce point, les autorités se veulent rassurantes. En 2018, suite à une question d'un sénateur du Nord qui demandait l'étendue du périmètre de distribution, le ministère de l'Intérieur assure que "sur l'ensemble du territoire national, l'État constitue préventivement des stocks de comprimés d'iode stable. Ils ont vocation à pouvoir être distribués à la population, selon les dispositions prévues dans le dispositif ORSEC-iode spécifique à chaque département." Pour connaître le plan ORSEC-iode de son département, il suffit de se renseigner auprès de sa préfecture. t
Des mesures similaires existent-elles dans d'autres pays ?
Si le doublement à 20 kilomètres de la centrale nucléaire semble important, il représente un périmètre moindre que chez nos voisins. A l'instar de la Suisse, qui compte cinq réacteurs. En 2014, les autorités de ce pays ont décidé d'élargir le périmètre de distribution des comprimés d'iode de 20 à 50 kilomètres. Plus d'un quart du pays est concerné.
En Belgique, depuis mars 2018, chaque personne qui le souhaite peut aller acheter ses comprimés en pharmacie. Le rayon de distribution a été élargi à 100 kilomètres, ce qui revient en réalité à recouvrir tout le pays, qui abrite sept réacteurs.
Autre exemple en Allemagne où le périmètre de distribution est variable, entre 25 et 100 kilomètres d'après le ministère de la Santé. Mais les autorités permettent aux Allemands d'en acheter librement, les comprimés étant accessibles sans ordonnance en pharmacie. En 2017, le gouvernement du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie a même permis la distribution gratuite d'iode pour les personnes vivant dans la région d'Aix-la-Chapelle. Les habitants de la région n'étaient pas rassurés de l'état des centrales belges voisines.
Alors pourquoi le périmètre français reste plus restreint que celui de nos voisins ? A cette question, l'ASN explique qu'une généralisation de "la distribution à tous les Français ne serait pas la meilleure décision pour sensibiliser aux bons reflex à adopter en cas d'incident." De plus, "les personnes qui se situent au-delà des 20 kilomètres ne resteront pas sans prise en charge, les départements assureront la distribution d'iode et les consignes à respecter seront communiquées par les autorités."
Il faut rappeler que la prise d'iode n'est pas anodine et n'a pas d'action préventive. "Les comprimés doivent être ingérés au bon moment, c'est-à-dire quand les autorités en donneront l'ordre", nous précise l'ASN.
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