"Suspension-remobilisation" : en quoi consiste cette nouvelle sanction encourue par les allocataires du RSA ?

par M.L (avec AFP)
Publié le 29 septembre 2023 à 14h58, mis à jour le 29 septembre 2023 à 15h21

Source : JT 20h Semaine

L'Assemblée nationale a adopté vendredi un nouveau principe de sanction sur les droits au RSA, qui donne la possibilité de suspendre le versement d'une allocation à une personne ne respectant pas ses obligations.
L'allocataire pourrait ensuite récupérer une partie de la somme en reprenant ses engagements.
Selon l'exécutif, cette mesure permet d'ajouter un palier avant la radiation et donc de sanctionner plus graduellement, un choix décrié à gauche.

Des ressources coupées, mais pas définitivement. L'Assemblée nationale a validé vendredi un nouveau principe de suspension des droits au RSA en cas de manquement, l'allocataire pouvant ensuite récupérer au moins en partie la somme perdue. L'exécutif défend une punition plus graduelle, une solution loin de faire l'humanité puisque la gauche a quant à elle fustigé une "honte". C'est lors de l'examen du projet de loi "plein emploi", débuté lundi, que les députés ont adopté un article instaurant cette "suspension-remobilisation", comme l'appelle le camp présidentiel. 

Si un allocataire n'élabore pas de "contrat d'engagement réciproque", ou ne respecte pas une partie de ses obligations, le conseil départemental pourra décider de suspendre le versement de son RSA. France Travail, qui remplacera Pôle Emploi dès 2024, pourrait aussi prendre cette décision, si le département lui délègue cette compétence. Dans le détail, un contrat d'engagement réciproque (CER) formalise les objectifs d'insertion professionnelle ou sociale du bénéficiaire du RSA et définit des échéances.

L'allocataire pourrait toutefois récupérer rétroactivement les sommes perdues s'il se conforme après-coup à ses obligations. Mais il ne pourrait récupérer qu'au maximum trois mois de versement du RSA, un plafond ajouté contre l'avis du gouvernement lors de l'examen du projet de loi au Sénat, mais qu'il a finalement accepté.

"Rapide à mettre en œuvre et rapidement réversible"

Actuellement, un allocataire qui ne respecte pas ses engagements peut déjà être sanctionné, sur décision du président du conseil départemental, par une réduction ou une suspension des versements, voire une radiation du droit au RSA en cas de récidive, explique le site du ministère des Solidarités. La sanction "qui consiste à amputer le RSA d'un foyer" existe donc, mais dans la pratique, "cette partie n'est jamais restituée", a affirmé le ministre du Travail Olivier Dussopt. 

Selon lui, le nouveau dispositif "suspension-remobilisation" permettra une sanction plus graduelle que la suspension sans versement rétroactif ou la radiation. "Aujourd'hui, il y a une radiation pure et simple, plusieurs dizaines de milliers de personnes par an. Ce que nous voulons créer, c'est une suspension qui (...) pourra durer un jour, une semaine... L'avantage, c'est rapide à mettre en œuvre et rapidement réversible", avait déjà défendu le ministre en mai dernier.

Loin d'être convaincue, la gauche a longuement fustigé un article de "la honte" : selon elle, il ferait grimper le nombre en fin de compte, en instaurant un nouveau type de sanction. "Au cœur de votre projet, ce n'est pas l'accompagnement, c'est le durcissement de la menace et de la sanction", a tancé le communiste Pierre Dharréville. "Tout montre que la sanction, elle conduit à la rue et à la sortie du dispositif, c'est factuel", a martelé de son côté le député socialiste Arthur Delaporte. Pour la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, la mesure va à l'encontre de la Convention internationale des droits de l'enfant, qui dispose que les États signataires doivent protéger l'enfant "contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique (ou) les activités (...) de ses parents"

À l'extrême droite, la mesure a aussi fait grincer des dents chez certains. "Il y a des gens qui ne peuvent pas se rendre à un rendez-vous Pôle emploi parce qu'ils n'ont pas la possibilité de payer le billet de train", a critiqué Jocelyn Dessigny, député RN. Malgré les protestations, l'article a été adopté par 38 voix contre 30 avec le soutien de la majorité et des LR. La gauche et le groupe Liot ont voté contre, tandis que le RN s'est abstenu.

Selon la Cour des comptes, un bénéficiaire du RSA sur deux ne signe actuellement pas de contrat d'engagement réciproque et les actions proposées sont "très faibles", à raison de moins de deux par contrat. Celles-ci n'aident guère le bénéficiaire "de manière concrète", estime l'institution.


M.L (avec AFP)

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