Squats et bidonvilles : la difficile scolarisation des ados

par Youen TANGUY
Publié le 27 septembre 2016 à 17h08
Squats et bidonvilles : la difficile scolarisation des ados
Source : KENZO TRIBOUILLARD / AFP

ENQUÊTE - Quelques semaines après le refus de plusieurs mairies de scolariser des enfants roms, un collectif publie une enquête alarmante : 53% des adolescents vivant dans des bidonvilles et des squats ne vont pas à l'école. Les "expulsions à répétition" et l'"invisibilité" de ces populations seraient en cause.

Les chiffres sont préoccupants. Selon une enquête du Collectif pour le droit des enfants roms à l'éducation (CDERE), plus de la moitié des ados vivant dans les bidonvilles et les squats de France ne sont pas scolarisés. Une étude publiée en pleine polémique sur les refus de plusieurs mairies de scolariser des enfants roms dans différentes écoles publiques.

"Sur les 161 jeunes interrogés, âgés de 12 à 18 ans, 85, soit 53% d'entre eux, ne vont pas à l'école", détaille Guillaume Lardanchet, directeur de l'association Hors la rue et membre du collectif. Ce taux atteint 67% si l'on intègre les enfants scolarisés, mais "non assidus". Un taux de déscolarisation particulièrement élevé, notmment si on le compare avec le taux national, établi à 7% pour la même tranche d'âge.

Les disparités sont aussi présentes dans les groupes, notamment au niveau des sexes. Selon l'enquête du CDERE, 56% des filles âgées de 12 à 18 ans ne sont pas scolarisées, contre 50% de garçons. Un écart encore plus flagrant chez les 12-13 ans avec 50% de filles qui ne vont pas à l'école contre 28% de garçons. Mais ce n'est pas le seul constat. Plus l'âge augmente, plus le taux de déscolarisation est élevé. A partir de 16 ans, lorsque l'école n'est plus obligatoire, 96% des ados (sexes confondus) vivant dans les bidonvilles et les squats sont déscolarisés.

Pour expliquer ce taux de scolarisation très bas, le CDERE avance plusieurs hypothèses. La première serait liée aux "expulsions à répétition" auxquelles s'ajoutent des "disparités territoriales" et un "manque de soutien aux initiatives locales des élus et des associations". Deuxième raison : le manque de données publiques fiables sur la situation de ces jeunes. Enfin, le collectif dénonce l'invisibilité de ces populations, majoritairement originaires de Roumanie et de Bulgarie, qui se reconnaissent souvent comme Roms ou désignés comme tels, "qui n'existent pas aux yeux des pouvoirs publics". 

Pour faire face au problème, le CDERE recommande notamment d'obliger les maires à dresser la liste des enfants soumis à l'obligation scolaire sur leur commune. Il demande égalemet une simplification des procédures administratives et des moyens matériels (eau, électricité), car "les conditions de vie en bidonville et squats ne permettent pas à un enfant d'avoir une scolarité effective et convenable". "On a voulu finir l'étude sur une note d'espoir et de bonnes pratiques", tempère Guillaume Lardanchet. 

En France, 9000 enfants et adolescents vivent dans des bidonvilles

Depuis quelques semaines, la scolarisation des enfants vivant dans des bidonvilles, notamment des enfants roms, fait polémique. Plusieurs mairies, dont celles de Saint-Ouen et de Maubeuge, ont en effet refusé d'accepter plusieurs enfants roms dans leurs communes. Vendredi, la préfecture de Saint-Denis avait pris les choses en main en mettant en demeure la mairie de Saint-Ouen de scolariser cinq enfants roms dans un délai de huit jours.

En France, 9000 enfants et adolescents vivaient en 2015 dans des bidonvilles. Le CDERE, créé en 2009 à l'initiative de membres du Collectif national Droits de l'Homme (CNDH) Romeurope, réunit des associations, collectifs et syndicats spécialisés sur les questions d'éducation et de droits de l'enfant.


Youen TANGUY

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