POLICE - Politique du chiffre, contrôles discriminatoires... un ancien brigadier de l'unité de lutte contre l'immigration irrégulière du Val-de-Marne dénonce dans un rapport les pratiques abusives de sa hiérarchie.
Un brigadier du Val-de-Marne a transmis à la fin du mois d'août un rapport au parquet de Créteil. Il y accuse sa hiérarchie de "détournements" des contrôles d'identité. Objectif : lutter contre l'immigration illégale.
Le policier affirme dans son courrier, révélé mercredi 13 septembre par Le Parisien, que ces contrôles d'identité, normalement destinés à la seule recherche d'infractions pénales - par exemple les vols - sur réquisition du parquet, ont en fait pour objet "le contrôle de la régularité du séjour des étrangers", une infraction administrative.
La politique du chiffre mise en cause
Les policiers devraient normalement contrôler la régularité du séjour des étrangers uniquement si une infraction préalable a été constatée. Le fonctionnaire, qui a depuis quitté l'unité de lutte contre l'immigration irrégulière du Val-de-Marne, souligne notamment que les contrôles sont "effectués au minimum deux fois par semaine" et "systématiquement" dans les gares RER et métros.
Des lieux où l'"on peut légitimement douter" que des infractions telles que les vols par effraction ou les vols de véhicules ont été commises, ajoute-t-il.
Son rapport relève également "les risques" liés à la hausse des objectifs de conduites au poste, portés selon lui de cinq à dix étrangers en séjour irrégulier à chaque opération.
Des instructions à caractère discriminatoire
"Certains de mes collègues contrôlaient les identités de personnes choisies non pas aléatoirement mais en raison de critères laissant penser qu'elles étaient étrangères, notamment la couleur de leur peau", affirme ainsi le policier.
Dénonçant "des instructions à caractère discriminatoire", le brigadier a aussi joint à son courrier un courriel de sa hiérarchie invitant les fonctionnaires à cibler les femmes pour "tenter de remplir [...] jusqu'à ce qu'il déborde" le centre de rétention administrative (CRA) pour femmes de Paris, sous-utilisé et menacé de fermeture.
Les centres d'hébergement d'urgence ciblés
Enfin, selon le fonctionnaire, pour améliorer les chiffres de reconduite à la frontière, des instructions ont été données visant à cibler les centres d'hébergement d'urgence pour y contrôler les étrangers qui ont déjà déposé une demande d'asile dans un autre pays de l'Union européenne et sont donc expulsables.
La Préfecture de police, à laquelle l'unité de lutte contre l'immigration irrégulière du Val-de-Marne est rattachée, n'a, pour l'heure, pas souhaité réagir.