COULISSES - Activité ludique et cérébrale dont la pratique explose chaque été, les mots croisés restent, en 2020, plébiscités par les Français. Plongée dans leurs secrets de fabrication.
Voilà une pratique qui aura non seulement résisté au passage du temps, mais aussi au grand boom technologique et à l'invasion des écrans. Un tour sur une plage de France suffit encore à le constater : les mots croisés font toujours fureur. Leur but n'a pourtant jamais varié : retrouver tous les mots d'une grille grâce à des définitions. Et un bon vieux stylo. Chaque année, 36 millions d'exemplaires de magazines de ces jeux sont vendus en France, 100.000 tous les jours. Un marché de 150 millions d'euros, représentant 10% du chiffre d'affaires annuel des libraires du littoral... et détenu par seulement trois éditeurs.
L'automatisation
Une question, dès lors, se pose : comment arrivent-ils à fabriquer autant de jeux différents, avec même plusieurs niveaux de difficulté ? L'un de ces éditeurs a ouvert ses portes à TF1. L'occasion de constater qu'en l'occurrence, c'est un ordinateur qui fait le gros du travail, la rédactrice devant l'écran ne sélectionnant que quelques mots pour les placer sur une grille. Signe des temps : un puissant algorithme prend ensuite le relais pour compléter, en quelques minutes, toutes les cases vides. "Il cherche tous les croisements qu'il peut faire avec les mots donnés", explique Cristalle Tourrenc, rédactrice chez Sport Cérébral. Ne reste alors plus qu'à rédiger les définitions, l'une des dernières choses se faisant encore à la main. Une grille est ainsi élaborée en moins d'une heure, via une production automatisée permettant de publier 10.000 jeux par mois.
L'artisanat
La création de mots croisés demeure cependant parfois aussi un travail artisanal. En fait l'œuvre de ce que l'on continue de nommer un verbicruciste, soit quelqu'un dont le métier consiste spécifiquement à créer des grilles de mots croisés (à ne pas confondre avec le cruciverbiste, l'amateur de mots croisés). Eux ne travaillent qu'avec leur matière grise. Et leurs grilles s'adressent à des amateurs exigeants, d'un niveau souvent plus élevé. "L'artisan, il va essayer de mettre plus de pièges, en mettant des mots compliqués parfois, en mettant des définitions un peu tordues, et en se disant qu'il faut que le lecteur souffre, pour qu'il prenne plaisir à trouver la solution", détaille Yves Cunow, verbicrusiste de profession. On parle là des grilles qui, en général, se trouvent dans vos journaux papiers. Ces objets dont il est souvent dit qu'ils sont d'un autre âge.