"Il m'a saisi à la gorge" : les témoignages de professionnels agressés par des anti-pass sanitaire

ML
Publié le 5 août 2021 à 9h56, mis à jour le 5 août 2021 à 10h08

Source : JT 20h Semaine

COVID-19 - Menaces, insultes, agressions parfois physiques : les professionnels de la culture et de la restauration font face ces derniers jours à des comportements hostiles de la part de certains clients, en colère contre les contrôles du pass sanitaire.

En quelques jours, l’ambiance s’est crispée à l’entrée des parcs d’attraction, lieux de culture et certains restaurants. Depuis l’extension du contrôle du pass sanitaire à ces établissements, annoncée par Emmanuel Macron le 12 juillet dernier, certains opposants à la mesure s’en prennent directement aux propriétaires des lieux. 

Chargés seulement de faire appliquer les nouvelles décisions gouvernementales, ces gérants se retrouvent au cœur de scènes encore inédites pour eux jusqu’alors. Jamais le directeur du parc d’attraction Walygator Grand Est, de Maizières-lès-Metz en Moselle, n'aurait imaginé être un jour agressé violemment par un client à l’entrée du centre. "Il m'a saisi à la gorge et m’a soulevé à une main, raconte Laurent Muller dans le reportage en tête. On s'est regardé les yeux dans les yeux, je ne touchais plus le sol"

"Projeté" contre des grilles à quelques mètres de là, "il y avait encore une autre barrière qui était là et que j'ai prise dans le dos" dont il garde "encore la trace et les douleurs" une semaine après, ajoute-t-il. 

"Il m'a dit que je faisais le jeu du gouvernement"

C’est un homme au pass sanitaire non valide qui s’en est pris au directeur d’exploitation, tandis que ce dernier contrôlait ses clients. La tension a rapidement grimpé. "Je lui ai proposé de repasser une deuxième fois le contrôle, mais c’était toujours non valide, se souvient le gérant. Mais il a rétorqué qu'il était vacciné depuis plus de sept jours pour la 2e injection, a exigé de passer et m'a dit que je faisais le jeu du gouvernement", poursuit-il. Une enquête a été ouverte et le directeur a pu bénéficier de trois jours d'incapacité temporaire de travail.

Si le cas est extrême, il illustre bien les tensions autour du pass sanitaire qui se multiplient partout en France. À Argelès-sur-Mer, dans les Pyrénées-Orientales, le restaurateur Landry Boyer a fait aussi les frais de la colère des anti-pass suite à une vidéo postée sur Facebook, dans laquelle il annonce : "Aujourd'hui à partir de ce midi au Costa, pass sanitaire obligatoire"

Le restaurateur participe alors à une expérimentation du contrôle de ce passeport, après une demande validée par la préfecture lui permettant de fermer boutique à 2h du matin, contre 23h pour tous les autres établissements dans le reste du département. Ce contrôle doit devenir obligatoire dans toute la France à compter du 9 août.

Une manifestation a alors été organisée juste devant son restaurant. "J’ai eu 30 à 40 personnes qui sont venues carrément bloquer le restaurant à son entrée, empêchant les clients de rentrer", raconte le gérant. Cette fois pas de violences mais des insultes, et même des menaces proférées sur les réseaux sociaux de "brûler [son] établissement, [lui] faire la peau"

Sous la vidéo publiée sur la page Facebook du restaurant, les commentaires hostiles affluent en effet : "Je ne viendrai plus manger chez vous", mais aussi des messages plus agressifs, comme "collabo", "tu ne choisis pas le bon camp". "Je ne vous cache pas que j’ai peur qu’on vienne me détruire mon établissement, donc je dors ici la nuit", confie le restaurateur. 

Les musées ne sont pas épargnés par cette vague d’animosité. Sur le fronton de l’aquarium de Biarritz, plusieurs lettres de l’enseigne avaient été arrachées après la nuit de mercredi 28 à jeudi 29 juillet. Depuis plusieurs semaines, le centre fait aussi face au saccage de certains de ses véhicules et mascottes. 

Des incivilités venant d’une minorité de clients agressifs, mais qui rendent le travail au quotidien éprouvant. "J’ai quand même une salariée qui est en arrêt maladie aujourd’hui parce que ça fait beaucoup à encaisser, déplore Olivier Mercoli, directeur général du site. J’essaie d’être là le plus souvent possible mais il y a quand même une tension palpable."

Certains clients montent au créneau pour défendre les équipes

Mais certains clients s’interposent parfois face à un visiteur agressif, et défendent les équipes. Stéphane Connole, animateur scientifique du centre insulté plusieurs fois lors de contrôles, a pu le constater : "Certains visiteurs s’en s’ont pris à moi verbalement, très ouvertement, et des personnes présentes dans la file sont intervenues, leur demandant d’arrêter en affirmant que je n’y étais pour rien, que ce n’était pas de ma faute s’ils n’avaient pas de pass sanitaire." Ce comportement rassure quelque peu les équipes, qui espèrent que la tension retombera avec le temps. Depuis quelques jours, l’animateur de l’aquarium de Biarritz a remarqué que les hostilités s’étaient d'ailleurs apaisées à l’entrée du musée.  

Outre les professionnels de la culture et de la restauration, les élus sont aussi pris pour cible des opposants anti-pass sanitaire. Selon Le Parisien, plusieurs députés ont déjà reçu des menaces de mort tandis que des maires ont également été pris à parti. Ces derniers jours, quatre guillotines factices ont été érigées dans les Landes, dans la communauté de communes Chalosse Tursan, accompagnés de la liste des noms de plusieurs centaines d’élus, signataires d’une tribune dans le Journal du Dimanche en soutien notamment à l’extension du pass sanitaire. L’une d’elle, à la tête de l’intercommunalité, a porté plainte et un suspect a été interpellé vendredi 30 juillet. 


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