ENQUÊTE - Tabac, alcool : ces publicités illégales qui pullulent sur les réseaux sociaux

Léa Tintillier | Reportage TF1 Hypollyte Corneille, Stéphane Iorgulescu
Publié le 25 mai 2022 à 21h06

Source : TF1 Info

Les publicités illégales sur le tabac et l’alcool pullulent sur les réseaux sociaux.
Des influenceurs sont ainsi rémunérés par des marques pour promouvoir leurs produits, au mépris de la loi Evin.
Le 20H de TF1 a mené l'enquête.

"Tu dois juste la respirer et le tour est joué", sourit un influenceur, une cigarette électronique à la bouche, la marque bien en évidence. Les réseaux sociaux pullulent de ces vidéos présentant des marques de cigarettes ou d’alcool, accompagnées d’un lien vers le site de vente en ligne. Ces influenceurs utilisent leur notoriété pour promouvoir ce genre de marques, qui les rémunèrent. 

Elise et Aubépine, toutes deux âgées de quatorze ans, tombent régulièrement sur ces vidéos sans savoir vraiment ce qu’elles ont sous les yeux. "Moi, je me dis que c’est normal, qu’ils vivent leur vie. Ils vont au resto, ils vont au café, ils vont dans les soirées…", affirme Elise. "C’est sûr que ce n’est pas précisé, on ne se doute pas que c’est un partenariat tout de suite. Ça ne saute pas aux yeux", ajoute Aubépine dans l'enquête du 20H de TF1 en tête de cet article. 

"On cherche à contourner la loi Evin"

La plupart du temps, ces contenus ne respectent pas la loi Evin de 1991 qui protège les jeunes de la publicité pour l’alcool et le tabac. Sur une vidéo que montre le reportage de TF1, des influenceuses se filment lors d’un voyage en Californie organisé par une grande marque de bières. "Le problème, c’est qu’on voit une marque d’alcool, dans une ambiance conviviale, et à aucun moment, on ne voit le message obligatoire pour les publicités ‘L’abus d’alcool est dangereux pour la santé’", explique Franck Lecas, responsable juridique du pôle loi Evin chez l’association Addictions France. 

Ici, la simple invitation à ce voyage est considérée comme un partenariat. Contactée, l’entreprise se défend pourtant de toute rémunération ou obligation. "Les influenceurs conviés sont libres de participer ou non à ces évènements, de publier ou non des contenus sur place ou a posteriori", répond-elle. "On est dans l’exemple de l’hypocrisie des marques et des influenceurs. Là, on cherche à contourner la loi Evin", reprend Franck Lecas. 

Jusqu'à 100.000 euros d’amende

Et pour contourner la loi, les marques mettent le prix. À la tête d’une agence qui met en relation entreprises et influenceurs, Cyril Attias reçoit souvent des propositions alléchantes, mais illégales. Il les refuse toutes, même si les contrats sont 20% à 30% plus élevés que la moyenne. "C’est entre 100.000 et 500.000 euros de campagne, et l’influenceur va toucher entre 1000 et 20.000 euros selon la notoriété de l’influenceur", explique-t-il. 

Léa Marie, influenceuse strasbourgeoise aux plus de 100.000 abonnés, a elle-même été approchée. Elle collabore parfois avec des marques d’alcool, mais toujours dans les règles. "On me demande parfois de cacher une publication sponsorisée en disant ‘je me suis acheté moi-même le produit, il est génial’. C’est quelque chose que je ne fais absolument jamais, mais je pense que parfois, quand on voit les zéros qui s’affichent à côté d’un contrat, il y a des personnes qui ferment les yeux et qui mettent les pieds en plein dedans", affirme-t-elle. 

Les contrôles et les condamnations demeurent rares sur les réseaux sociaux. La loi prévoit 75.000 euros d’amende pour une publicité illégale d’alcool, et 100.000 euros pour du tabac. 


Léa Tintillier | Reportage TF1 Hypollyte Corneille, Stéphane Iorgulescu

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