VIDÉO - Interdire le portable à l'école : pourquoi ça va être compliqué de faire raccrocher les élèves

Publié le 30 juillet 2018 à 17h09
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Source : Sujet JT LCI

ÉCRANS - Les députés ont définitivement adopté ce lundi l'interdiction des téléphones portables dans les écoles et collèges, en vue d'une application à la rentrée 2018. C'est pourtant déjà le cas dans les salles de classes. Mais sans moyens logistiques, humains et juridique supplémentaires, le ministre de l'Éducation pourrait avoir du mal à aller plus loin. Explications.

Est-ce le nouveau serpent de mer éducatif français ? Promise par Emmanuel Macron pendant la campagne, relancée par son ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer, l'interdiction des téléphones portages à l'école et au collège a été adopté définitivement ce lundi par le Parlement, sous la forme d'une proposition de loi du groupe La République en marche. Une mesure dont l'ancien recteur s'est fait le porte-parole depuis sa prise de fonctions.

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Interdire le portable, oui mais où et quand ?

L'usage (mais pas la possession) du téléphone portable en classe est déjà réglementé. L'article L511-5 du code de l'éducation dispose en effet que "dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l'utilisation durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d'un téléphone mobile, est interdite." Actuellement, c'est à l'équipe dirigeante de chaque établissement de préciser les lieux d'interdiction, de faire respecter celle-ci et de mettre en place les sanctions qui peuvent aller, en primaire par exemple, de la simple retenue jusqu'à l'exclusion de l'élève.

Jean-Michel Blanquer veut-il rendre cette interdiction parfaitement effective ? Veut-il l'étendre obligatoirement à de nouveaux lieux ? En septembre, dans L'Express, il expliquait vouloir "faire respecter les règles et le droit", et rappelait déjà que "l'usage des téléphones est interdit en classe".

En décembre 2017, le ministre ne précisait, ni le périmètre de l'interdiction, ni les modalités pour la faire respecter : "Nous sommes en train de travailler sur les modalités, ça peut prendre des modalités différentes. On peut en avoir besoin pour des usages pédagogiques ou des situations d'urgence. Il faut que ce soit confiné, ce qui au passage existe déjà : il y a des collèges qui le font déjà." 

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Les entreposer dans des casiers ? Un "cauchemar logistique"

En septembre, le ministre avançait une ébauche de solution : "En Conseil des ministres, nous déposons nos portables dans les casiers avant de nous réunir. Il me semble que cela est faisable pour tout groupe humain, y compris une classe".

La première fédération d'associations de parents d'élèves, la Peep, s'était alors interrogée sur la faisaibilité de cette mesure, et estimait qu'elle posait "un problème de logistique effroyable". "Imaginons un collège de 600 élèves. Ils mettent tous leur téléphone dans une boîte ? Comment fait-on pour les stocker ? Et pour les restituer à leur propriétaire à la fin des cours ?" se demandait le président de la Peep, Gérard Pommier, estimant que "les conditions ne sont pas réunies", faute de locaux et de personnel. Un problème de moyens qui compliquerait également l'exploration de la piste de casiers individuels et sécurisés.  

Devant cette levée de boucliers, le ministre est revenu sur ses propos, laissant aux établissements "une liberté [...] quant aux modalités choisies.". Sans proposer de solution, donc.

Confisquer les portables ? Il faudra une loi

Pour rendre effective une interdiction d'utiliser le téléphone, ou pour le saisir dès l'entrée dans l'enceinte de l'établissement ou de la classe, les possibilités juridiques demeurent restreintes, et des mesures d'interdiction totale pourraient porter atteinte à des libertés fondamentales.  De plus, la confiscation est autorisée à titre préventif seulement pour les objets dangereux, et interdite à titre de sanction. Enfin, si le règlement intérieur peut prévoir une confiscation comme punition, celle-ci peut être annulée par la justice administrative si elle dépasse une certaine durée, car elle va à l'encontre du droit de propriété, comme le souligne Me Valérie Piau, avocate spécialisée en droit de l'éducation, sur son site.

Le magazine L'Étudiant rappelle que, sans accord de l'élève, "seul un officier de police judiciaire est habilité à mettre en œuvre une fouille". Juridiquement, "l'objet confisqué est placé sous la responsabilité de celui qui en a la garde du fait de la confiscation", et l'élève (ou un parent) peut donc demander une indemnisation financière "si la confiscation est effectuée sans dresser un état contradictoire de l'appareil et sans garantie de conservation".

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Les brouilleurs ? Une proposition de 2012 impossible à mettre en oeuvre

En 2012, le député UMP Philippe Meunier proposait d'installer dans les établissements scolaires des brouilleurs d'onde GSM. Une solution qui pourrait présenter l'avantage de rendre inutilisables les téléphones sans les confisquer. Mais le ministre de l'Éducation de l'époque, Vincent Peillon, lui a opposé l'article L33-3-1 du Code des postes et des communications électroniques, qui interdit "l'utilisation de tout dispositif destiné à rendre inopérants des appareils de communications électroniques de tous types, tant pour l'émission que pour la réception". Si les théâtres et cinémas font office d'exception, ce n'est pas le cas des écoles.

Au-delà de ce souci juridique, le brouilleur pose un problème technique : il ne fait pas le tri entre les téléphones et bloque aussi les communications du professeur, qui pourrait en avoir besoin en cas d'urgence, et peut aussi bloquer au delà de la salle de classe les téléphones de personnes qui n'ont rien demandé.


La rédaction de TF1info

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