DÉFLAGRATION - Un rapport choc dévoilé mardi secoue l'Église de France. Il révèle que 216.000 enfants ont été victimes d'actes sexuels ces 70 dernières années, commis par environ 3000 ecclésiastiques. Victime de l'un d'entre eux, Emmanuel Bailhache témoigne face aux caméras de TF1.
La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase) a publié mardi matin un rapport accablant, à partir d'une enquête commandée à l'Inserm. Il établit que, depuis 1950, 216.000 personnes ont fait l'objet de violences ou d'agressions sexuelles dans leur enfance de la part de clercs ou de religieux et religieuses. Le nombre de victimes monte à 330.000 si l'on ajoute les personnes agressées par des laïcs travaillant dans des institutions de l'Église. Dans le reportage qui ouvre cet article, TF1 a rencontré une de ces victimes, qui témoigne avec force du poids du traumatisme, et accuse l'Église.
La toute puissance d'un pédocriminel, le silence de l'Église qui pourtant savait, la honte d'une victime. Adolescent, Emmanuel Bailhache a été la proie d'un prêtre pédophile pendant des années. Ce n'est que l'été dernier qu'il a réussi à dénoncer son bourreau, inquiet de le voir se rapprocher de ses propres fils. Emmanuel explique les mécanismes de l'emprise, comment il se rassurait en se disant : "Il te fait plus de bien qu'il ne te fait de mal". "J'ai passé de nombreuses années comme ça", témoigne-t-il, "et son emprise sur moi était de plus en plus forte".
Si l'Église avait agi dès l'origine, jamais je n'aurais été victime
Emmanuel Bailhache, victime d'un prêtre pédophile
Emmanuel en parle enfin à sa femme, à ses amis très proches, et à ses enfants. Il contacte alors ses anciens camarades, et localise neuf autres victimes. "Plusieurs d'entre elles ont été violées, plusieurs fois, par ce même prêtre", insiste-t-il. Sa colère se dirige aussi contre l'Église, qui était consciente des agissements de ce prêtre, mais n'a fait que le déplacer de diocèse en diocèse. "Si l'Église avait agi dès l'origine, jamais je n'aurais été victime", rappelle Emmanuel. Cette indifférence est dénoncée par les auteurs mêmes du rapport, comme le relaie le tweet ci-dessous.
L’Église catholique a manifesté "jusqu'au début des années 2000 une indifférence profonde, et même cruelle à l'égard des victimes" de pédocriminalité, a affirmé Jean-Marc Sauvé, le président de la Commission #AFP pic.twitter.com/YrJGFYTSkX — Agence France-Presse (@afpfr) October 5, 2021
Le cas terrible d'Emmanuel peut désormais être multiplié par les chiffres du rapport publié ce matin. 216.000 autres victimes encore vivantes sont dans son cas, pour les seules 70 dernières années. Le nombre de prédateurs sexuels au sein de l'Église sur la même période, est estimé entre 2900 et 3200. Dès la publication ce mardi matin, les représentants des victimes ont réagi avec force. Présent à la conférence de presse de présentation, François Devaux, fondateur de l’association La parole libérée, et lui-même au nombre des victimes entendues par la commission Sauvé, a martelé face aux représentants du clergé présents : "Vous devez payer pour tous ces crimes".
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Présent lui aussi, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, Conférence des évêques de France, a pris la parole en leur nom : "J’exprime ma honte, mon effroi. Mon désir en ce jour est de vous demander pardon, pardon à chacune et à chacun". La Commission à l'origine du rapport préconise d'améliorer l'écoute et l'indemnisation des victimes, la formation des prêtres et religieux, et de réformer le droit de l'Église, pour mettre un terme au sentiment d'impunité des pédocriminels.
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