SGANARELLE EN JUPONS - Samantha Avril, engagée comme médecin grâce à un faux diplôme, a été mise en examen fin septembre après avoir exercé durant quatre mois dans un centre de santé de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire). "Sept à huit" vous raconte son histoire.
Elle a dupé tout le monde. A commencer par le conseil départemental de l'Ordre des Médecins de Saône-et-Loire qui lui a fourni sa carte professionnelle. Son président, Gérard Montagnon se souvient : "Elle me paraissait connaître correctement la déontologie médicale", dit-il. Et comme son inscription s'est faite pendant le confinement, elle a été validée sur la foi de documents transmis par voie numérique.
Grâce à ce précieux sésame, en mai dernier, le centre de santé de Montceau-les-Mines embauche Samantha Avril les yeux fermés, alors qu'elle n'a en fait aucun diplôme. La jeune femme de 35 ans récupère la patientèle d'un confrère qui vient de quitter la région, devenant ainsi le médecin traitant de 1.200 personnes. Salaire mensuel : 5.000 euros. Pendant quatre mois, elle va exercer sans que la direction ne s'aperçoive de la supercherie.
Pourtant, les témoignages de patients abusés s'accumulent contre elle : une femme qui consulte pour un hématome au genou, et à qui elle diagnostique, sans auscultation ou presque, une embolie pulmonaire et une phlébite ; un mari qui souffre de rétention d'eau et qui se retrouve, faute de soins, en réanimation... Plus grave encore, l'un de ses anciens patients, plongé dans le coma, est décédé.
Intriguée par son comportement
"Je l'avais trouvé un peu niaise mais jamais de la vie je n'aurais pensé que c'était un faux médecin", reconnaît Régine, dont l'époux s'est retrouvé dans un état critique. Pourtant, un deuxième incident va la faire douter de ses compétences. Cette fois c'est Sandrine, sa fille qui va faire les frais d'un mauvais diagnostic. La jeune femme va consulter Samantha Avril pour de fortes douleurs au dos et à la poitrine. "Elle m'a pris la tension par-dessus les vêtements, pareil avec le stéthoscope", raconte-t-elle. Et le médecin de conclure : "C'est une crise d'angoisse, je vais vous donner un antidépresseur". Sauf que les douleurs ne passant pas, la jeune femme décide d'aller aux Urgences où on lui annonce qu'elle est en train de faire un infarctus. Elle sera opérée du cœur, et finalement s'en sortira bien.
Et c'est bien là que le bât blesse, car à chaque fois, ces personnes escroquées, trop préoccupées par l'état de santé d'un de leur proche ou sorties d'affaire in extremis, ne signaleront pas la supercherie, laissant la fausse médecin continuer en toute sérénité sa pratique illégale de la médecine. C'est finalement au sein du centre médical où elle exerce que des voix vont commencer à s'élever. Notamment de la part de deux secrétaires médicales, de plus en plus intriguées par son comportement. Elles notent, par exemple, que tous les patients sortaient de ses consultations avec un très gros bilan sanguin à faire, "avec parfois 4 à 5 pages de résultats". De plus, "elle passait un temps incroyable à les interpréter. On voyait qu'elle était perdue", témoigne l'une d'elle.
Licenciée sur le champ
Un autre jour, alors que Samantha Avril est un peu souffrante, elle prévient le secrétariat qu'elle va reprendre le travail le lendemain, mais ses propos surprennent, car elle va préciser : "ce soir, je vais voir mon médecin traitant". "On n'a jamais vu ça, tous nos médecins sont leur propre médecin", s'étonne sa collègue. Intriguée, le 11 septembre, l'une des secrétaires, va faire part de ses doutes à un médecin du centre. En rentrant chez lui, ce dernier a une idée toute simple, il va vérifier si Samantha Avril a bien passé une thèse en médecine générale, condition sine qua non pour devenir docteur. Et bien sûr, il ne trouvera rien.
Aussitôt, ce médecin informe sa direction qui convoque dès le lendemain l'usurpatrice. Celle-ci finira par avouer qu'elle a bien fait quelques études de médecine mais sans aller jusqu'au bout. Samantha Avril est licenciée sur le champ et la direction porte plainte. En garde à vue, la jeune femme expliquera qu'elle s'est procurée un diplôme sur internet. Il lui aura suffi de quelques clics pour l'acheter 200 euros.
Elle est schizophrène, elle entend des voix qui lui disent que dans la vie il faut aider les autres.
Son avocat
Samantha Avril est aujourd'hui incarcérée à la Maison d'arrêt de Dijon. "Depuis son arrestation, elle se rend compte qu'elle a été très dangereuse et elle regrette profondément d'avoir mis en péril la santé de certaines personnes", avoue son avocat. "Incontestablement elle est malade, affirme-t-il. Elle est soignée depuis 2012, elle est schizophrène, elle entend des voix qui lui disent que dans la vie il faut aider les autres, il faut les soigner, voilà ce qu'elle m'a dit".
En fait, Samantha Avril aurait toujours rêvé de soigner les gens. A 25 ans, elle décroche un diplôme d'aide-soignante, puis s'inscrit successivement dans cinq écoles d'infirmières mais elle abandonne à chaque fois ou échoue aux examens. En 2018, faute de mieux, elle devient surveillante dans un lycée à Macon.
Aujourd'hui, tous les regards se tournent vers l'Ordre des médecins qui aurait fait preuve de négligence. D'autant que Samantha Avril était déjà dans le collimateur de la justice. Il y a un an, elle avait essayé de se faire passer pour une infirmière dans ce même département. Mais avant qu'elle n'exerce, elle avait été démasquée par l'Agence régionale de santé qui avait alerté le procureur de la République.
Jusqu'à 20 ans de prison
Son mari, enseignant à la retraite, de quarante ans son aîné, pensait pourtant qu'elle allait mieux depuis quelques années sous l'effet d'un lourd traitement, et après deux internements en hôpital psychiatrique. Lui non plus n'a pas voulu croire qu'elle lui mentait. "Je n'ai plus de doutes quand il y a une confirmation de son inscription par l'Ordre des médecins, c'est ce qui a fait pencher la balance", reconnaît-il. "S'il y a eu un faux document avec l'infirmière, là je me suis dit qu'ils ont dû vérifier, et donc j'ai voulu y croire", ajoute-t-il.
L'instruction devra maintenant déterminer si la mort du patient qui était dans le coma est liée aux prescriptions de la fausse médecin. Si tel est le cas, elle encourt jusqu'à 20 ans de prison pour "homicide involontaire".
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