"Sommet démographique" : face à la peur identitaire, que disent réellement les chiffres ?

V.F
Publié le 24 septembre 2021 à 20h04, mis à jour le 27 septembre 2021 à 15h47

Source : JT 20h WE

DÉCRYPTAGE - À Budapest, la droite identitaire européenne s'est retrouvée à l'invitation du Premier ministre, Viktor Orban. Au cœur des discussions, la théorie du grand remplacement. Le 20H de TF1 a voulu savoir ce que disent vraiment les statistiques.

Deux têtes d'affiche en invités d'honneur. Invités par Viktor Orban, le Premier ministre hongrois, Marion Maréchal et Éric Zemmour ont assisté ce vendredi 24 septembre, à Budapest, à un sommet consacré officiellement à la démographie. Mais rapidement, à la tribune, le dirigeant souverainiste à la tête de la Hongrie développe ses sujets de prédilection et dit craindre notamment un effondrement de l'Europe à cause de l'immigration musulmane. 

Lui emboitant le pas, Marion Maréchal prend ensuite la parole et évoque la France. "Certaines projections indiquent que les Français d'origine française, si je puis dire, seront minoritaires en France en 2060, c'est-à-dire dans 40 ans", dit-elle. C'est la théorie complotiste dite du grand remplacement (de la population européenne par une population immigrée, ndlr) et elle fait beaucoup débat. 

Une immigration très diversifiée

Pour comprendre, le JT de 20H a compulsé les chiffres officiels à ce sujet, en regardant d'abord le nombre d'immigrés en France depuis plus de 50 ans. En 1968, le pays comptait officiellement 3,2 millions d'immigrés, selon les chiffres de l'INSEE. En 2020, c'était 6,8 millions. Leur nombre a donc doublé. 

Mais d'où viennent ces immigrés ? Si l'on distingue trois grandes régions, l'Europe, l'Afrique et l'Asie, les chiffres sont très parlants. Au début, les immigrés venaient très majoritairement d'Espagne, d'Italie et du Portugal. On observe ensuite une évolution en faveur des pays du Maghreb, mais pas seulement ; les autres pays d'Europe, d'Afrique et d'Asie progressent aussi. Ce qui donne en 2020, rappelle l'Insee, une immigration très diversifiée et pas seulement en provenance du Maghreb.

L'hypothèse selon laquelle il y aurait une sur-fécondité qui se transmettrait de génération en génération (...) est fausse.
Patrick Simon, démographe à l'Ined

La théorie du grand remplacement suppose aussi une explosion des naissances chez les migrants d'origine maghrébine. Mais cette théorie n'est pas vérifiée dans les faits, répond Patrick Simon, démographe à l'Institut national d'études démographiques (Ined). "Les descendants d'immigrés, c'est-à-dire les enfants de ces familles immigrées maghrébines qui naissent en France et qui grandissent, ont un niveau de fécondité extrêmement comparable à celui de la moyenne des familles en France. Donc l'hypothèse selon laquelle il y aurait une sur-fécondité qui se transmettrait de génération en génération, de telle sorte que ça s'accumulerait jusqu'en 2050, est fausse", tranche-t-il.

Autre questionnement : alors que la théorie du grand remplacement oppose les Français d'origine française aux immigrés, pendant combien de générations doit-on encore parler d'immigrés ? Jérôme Lê, chef de la cellule étude et statistique sur l'immigration à l'Insee, s'interroge : "Est-ce qu'on est encore lié à l'immigration lorsqu'on a un grand-parent qui était Italien, Portugais ou Algérien ? Lorsqu'on s'intéresse aux petits-enfants d'immigrés et bien souvent il n'y a qu'un seul grand-parent qui est d'origine immigrée", constate-t-il. 

L'Insee prend également soin de rappeler qu'aujourd'hui un immigré sur deux arrivant en France est diplômé de l'enseignement supérieur. Par ailleurs, les immigrés présents dans l'Hexagone sont désormais majoritairement des femmes.


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