C’est une pratique qui attise la curiosité de 100.000 Français chaque année, mais qui reste illégale dans l'Hexagone.De plus en plus de sites internet proposent des tests ADN, mais sont-ils vraiment fiables ?
Explorer son code génétique en quelques clics, voici la promesse de nombreuses sociétés en ligne. Pour cela, rien de plus simple, il suffit de commander un kit à partir de 50 euros. Dans l'enquête du 20H de TF1 en tête de cet article, Mathilde se prête au jeu. Après plusieurs semaines, elle reçoit enfin les réponses à questions sur ses origines. "Les premiers résultats tombent, à 41% ibère, 35% ouest et nord européen, 20% italienne, ça je le savais." Ce qu'elle découvre en revanche, c'est cette origine espagnole ou portugaise, pourtant absente de son histoire familiale. "Je n'ai pas encore trouvé dans mes recherches des personnes espagnoles ou portugaises. C'est une énigme non résolue, mais je compte bien continuer mes recherches."
Comme Mathilde, 100.000 Français réalisent chaque année des tests ADN sur Internet. Pourtant, en France, peu sont au courant, mais ces tests sont interdits sous peine d'une amende de 3.570 euros, ce qui n'empêche pas leur succès. Ainsi, de nombreux influenceurs surfent sur cette tendance et révèlent leur potentiel ADN à leurs abonnés. "J'ai 17% de sang Espagne/Portugal", lance le Youtuber Squeezie dans l'une de ses vidéos dédiées à ces fameux tests. Mais sont-ils vraiment fiables ?
L'ADN ne permet pas de déterminer une origine ethnique
Pour le généticien Paul Verdu, ces tests ne peuvent pas être considérés comme fondés. L’équipe de TF1 lui a montré les résultats obtenus par Mathilde, et son avis est sans appel. "Alors là, justement, c'est assez compliqué pour moi d'expliquer ce genre de choses puisque les catégories sont mélangées. On a des zones géographiques comme ouest européen, on a des nationalités comme Italie. On compare des œufs et des carottes en fait." D'autant plus que l'ADN ne permet pas de déterminer une origine ethnique. Ces sociétés peuvent simplement comparer vos gènes avec ceux de clients d'autres pays. De cette manière, ils déduisent une probable origine. "Ces tests sont statistiques, ils ne dépendent que de l'information qui est contenue dans les bases de données. Si vous changez la base de données en y incluant d'autres personnes par exemple, vos résultats peuvent changer", conclut Paul Verdu.
Au-delà de l'incertitude des résultats, il existe un risque d'atteinte à la vie privée. Même aux États-Unis, où les tests sont devenus un véritable phénomène de société, leur régulation inquiète. En 2019, le Pentagone a notamment demandé aux militaires américains de ne pas utiliser ces kits. "Les tests génétiques grand public échappent largement à la régulation, et pourraient dévoiler des informations personnelles ou génétiques, et potentiellement (…) entraîner des risques pour les forces armées en mission". L’avocate Nathalie Devillier souligne le même problème d'utilisation des données. "Le modèle économique des sociétés qui vendent repose sur une collecte de vos données génétiques qui sont ensuite réexploitées. Cela signifie qu'on en perd totalement le contrôle", explique-t-elle. Potentiellement, vos données génétiques pourraient donc être utilisées par des entreprises privées, y compris les compagnies d'assurance.