La France secouée par une vague de violences urbaines après la mort de Nahel

Violences urbaines : polémique à Saint-Gratien après l'appel à la délation lancé par le maire

Publié le 13 juillet 2023 à 18h09, mis à jour le 13 juillet 2023 à 18h17

Source : JT 20h Semaine

Après les violences urbaines qui ont éclaté dans sa ville du Val d'Oise, le maire de Saint-Gratien a fait part de sa colère.
Il a menacé de ne pas reconstruire le centre culturel incendié si les habitants ne dénonçaient pas les personnes responsables de ces incidents.
"La neutralité est considérée comme de la complicité", a-t-il déclaré dans une lettre envoyée à ses administrés.

Le maire de Saint-Gratien a laissé éclater sa colère. Comme des centaines de communes ailleurs en France, cette ville du Val-d'Oise a été frappée par des violences urbaines suite à la mort de Nahel, tué à l'âge de 17 ans par le tir d'un policier. Le centre culturel Camille Claudel, situé dans l'un des quartiers de la ville, les Raguenets, a été entièrement incendié. Une situation qui a amené son maire, le Républicain Julien Bachard, à faire une déclaration qui a, à son tour, provoqué la polémique.

Tant que nous ne possèderons pas les noms des auteurs des faits, aucun travaux de reconstruction ne sera engagé
Julien Bachard

Dans une lettre envoyée à ses administrés, il a dénoncé les "violences" et "exactions intolérables" que la commune a subi, rapportant en plus de l'incendie du centre culturel, "l'attaque de commerces du centre commercial" et la "dégradation de l'aire de jeux". "Qui va payer pour la remise en état de tous ces équipements brûlés, cassés, pillés ?", s'est-il encore interrogé, assurant que la municipalité ne savait pas si elle avait "la capacité financière de reconstruire ces structures". 

Il a par ailleurs appelé les habitants du quartier à dénoncer les responsables sans quoi il n'engagerait pas la reconstruction du site. "Tant que nous ne possèderons pas les noms des auteurs des faits, aucun travaux de reconstruction ne sera engagé", a-t-il menacé dans ce document, qui a été publié sur la page Facebook de la ville, le 30 juin dernier. "Le seuil de tolérance est largement dépassé et maintenant la neutralité est considérée comme de la complicité", a-t-il renchéri, évoquant également les difficultés financières qui empêchaient les éventuelles reconstructions.

"Le sentiment de double-peine"

Un ultimatum qui n'a pas laissé la commune indifférente. L'opposition a notamment dénoncé la stigmatisation d'une partie des habitants de la ville. "Ne donnons pas la responsabilité aux habitants qui sont déjà pénalisés d'en plus devoir débusquer des auteurs de faits, alors qu'ils n'en ont aucune connaissance et de le corréler à la reconstruction, ça s'apparente quand même à du chantage", a déclaré auprès de BFMTV, Emmanuel Mikael, conseiller municipal MoDem dans cette ville de 5000 habitants.

L'association des maires d'Île-de-France a également réagi, assurant comprendre la colère de l'élu tout en condamnant cet appel à la délation. Une position partagée par le ministre de la Cohésion des Territoires, Christophe Béchu, interrogé à ce sujet après avoir présenté le projet de loi d'urgence sur la reconstruction des bâtiments endommagés, adopté en Conseil des ministres, ce jeudi 13 juillet.

"L'expression d'un certain nombre de maires, d'habitants des quartiers, de ras-le-bol, d'exaspérations, le sentiment de double-peine, d'être à la fois stigmatisé et dans le même temps d'être privé d'un certain nombre de services publics de proximité dont ils ont besoin, je les comprends et je vais vous dire, je les partage", a certifié Christophe Béchu, avant de poursuivre en évoquant le maire de Saint-Gratien. "Que ça puisse le conduire à avoir un certain nombre de mots, ou à traduire une exaspération, je le comprends. Mais nous n'allons pas institutionnaliser ou légiférer sur le principe que la délation serait un préalable à des règles d'urbanisme", a-t-il martelé.

Contacté, le maire de Saint-Gratien n'était pas disposé à réagir à la publication de cet article. Les habitants de Saint-Gratien ne sont pas les seuls à devoir subir la double répercussion de la dégradation de bâtiments publics lors des violences urbaines. Face au risque de nouvelles violences lors des célébrations du 14 juillet, plusieurs communes ont décidé d'annuler leur feu d'artifice. Au Blanc-Mesnil, en Seine-Saint-Denis, la municipalité a de son côté décidé d'annuler sa plage d'été afin que l'argent économisé soit utilisée pour la reconstruction des bâtiments dégradés.


Aurélie LOEK

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