À LA LOUPE – En redressement judiciaire, XL Airways illustre les difficultés rencontrées par de nombreuses compagnies aériennes européennes. Son patron avance le chiffre de 32 faillites à l'échelle continentale en seulement deux ans. Qu'en est-il vraiment ?
C'est un Laurent Magnin très remonté qui s'est présenté sur le plateau de BFM Business à la fin septembre. Le patron d'XL Airways est revenu sur les événements qui ont conduit sa compagnie à se déclarer en cessation de paiement. Il a fustigé le groupe Air France-KLM, qui a mis fin (après un an de négociations) à un projet de reprise, mais aussi les charges sociales qui plombent les compagnies françaises.
Au cours de l'interview, Laurent Magnin évoque la situation critique dans laquelle se trouvent de nombreuses entreprises du secteur. "On a eu 32 faillites de compagnies aériennes en Europe, ces deux dernières années", lance-t-il, "les 32 faillites se sont passées de la même façon."
Une hécatombe à travers l'Europe ?
Avec 24 000 avions commerciaux et 4,3 milliards de passagers embarqués en 2018, le secteur aérien poursuit sa croissance à un rythme effréné : il double en moyenne tous les 15 ans. Dans ce contexte, le chiffre avancé par le PDG de XL Airways surprend. Contacté par LCI, il n'a pour l'heure pas précisé ses sources.
L'association professionnelle Airlines for Europe, qui représente 70% du secteur aérien à l'échelle continentale, ne peut pas officiellement confirmer un tel chiffre, mais l'estime "plausible", surtout si l'on prend en compte les petites compagnies. À défaut d'une comptabilisation officielle, il faut donc dresser soi-même une liste pour tenter d'y voir plus clair.
Dans un tableur, LCI a répertorié les compagnies qui ont fait faillite depuis 2017 en Europe. En excluant celles qui se concentraient sur le fret ou celles qui ont fusionné durant cette période, on obtient un décompte (sans doute non exhaustif) de 38 compagnies. Parmi elles, 20 étaient basées au sein de l'Union européennes. Les 18 autres venant de pays considérés comme européens, mais non membre de l'UE (Angleterre, Islande, Russie…).
Les résultats obtenus corroborent donc les propos de Laurent Magnin. Il convient toutefois de préciser que l'impact de ces cessations d'activité varient d'une compagnie à l'autre, en fonction de leur taille et de l'importance de leur flotte. XL Airways compte par exemple 600 salariés, Aigle Azur en rassemblait 1200. C'est bien plus que certaines petites structures qui opéraient dans les pays de l'Est ou qui ne rayonnaient qu'à un échelon national ou régional.
Comment expliquer ces faillites ?
Sur le plateau de BFM Business, le patron de XL Airways a regretté le projet de fusion avorté avec Air France, mais aussi cité pêle-mêle les charges élevées en France et la concurrence de compagnies telles que Norwegian. Cette dernière propose des tarifs imbattables, notamment pour des trajets transatlantiques, ce qui fragilise la concurrence. Le ministre de l'Économie est d'ailleurs monté au créneau lors du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro : " Elle casse les prix, elle est endettée, mais elle a un soutien public norvégien, et ça, je ne peux pas l'accepter", a asséné Bruno Le Maire.
Pour l'association Airlines for Europe et son directeur général Thomas Reynaert, cette situation est due à une série de facteurs qui se combinent : "l'augmentation des coûts du carburant, une concurrence féroce, mais aussi aux dépenses engendrées par la mise en conformité avec certaines réglementations de l'Union européenne. Il fait ici référence aux compensations des droits des passagers, en cas de retards ou d'annulations.
Représentante de la FNAM-CSTA, la Chambre syndicale du transport aérien, Brigitte Barrand comprend le message envoyé par le patron de XL Airways, en particulier lorsqu'il évoque les charges sociales élevées. " La FNAM n'a cessé d'alerter les pouvoirs publics depuis des années", note-t-elle, "en France, le poids des taxes est particulièrement élevé par rapport à nos voisins, ce qu'a confirmé un rapport de l'Association internationale du transport aérien au printemps."
Sans l'arrivée d'un repreneur capable d'injecter 35 millions d'euros, XL Airways va connaître le même sort qu'Aigle Azur il y a quelques semaines. Pour protéger les passagers et leurs éviter de se retrouver bloqués, la compagnie a annoncé le 30 septembre qu'elle interrompait ses vols. Ses clients sont désormais invités à se rapprocher de leurs assurances pour bénéficier d'une indemnisation.
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