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Audrey Zitter, entraîneuse de rugby : "Sur le terrain, je ne vois aucune différence entre homme et femme"

Publié le 8 septembre 2023 à 10h30
JT Perso
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Source : JT 20h Semaine

Cadre technique de la Fédération française de rugby à XIII, formatrice, ancienne entraîneuse d’équipes masculines et féminines de haut niveau, Audrey Zitter porte un regard avisé sur son sport.
À l’occasion de la Coupe du monde de rugby, elle en décrypte sa féminisation progressive et partage son expérience d’entraîneuse de l’équipe masculine de Montpellier.

Mêlée, impacts, placages, déblayages… Sur les terrains de rugby, les contacts mettent les corps à rude épreuve. En France, les 324 326 licenciés (au 31 décembre 2022) s’en donnent à cœur joie. Côté femme, la Fédération française enregistrait une hausse des licenciées de 22 % entre 2021 et 2022. Le nombre de pratiquants reste néanmoins déséquilibré : seules 26 000 femmes arpentent les terrains avec un ballon ovale dans les mains. En guise d’explication, la persistance de préjugés. En 2007, le sélectionneur Fabien Galthié affirmait encore qu’il y avait des sports plus féminins : "Pratiquer le rugby pour une femme, je ne pense pas que ce soit idéal."

En pratique, Audrey Zitter n’a pas souffert de misogynie. Cadre technique de la Fédération française de rugby à XIII, manageuse de l’équipe de France féminine entre 2017 et 2019, elle a également entraîné l’équipe masculine de Montpellier de cette discipline entre 2013 et 2016. Elle reste la première femme à entraîner une équipe sportive senior masculine de haut niveau en France. Avec du recul, elle analyse très positivement son expérience : "Je n’ai jamais eu de souci avec les joueurs. Je n’ai pas eu de réflexion ni subi de situations embarrassantes, y compris sur les terrains adverses. Ça ne m’a pas préoccupé d’être une femme dans cet environnement masculin". 

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Le vestiaire, un sanctuaire pour les joueurs

L’entraîneuse se rappelle que lors de la première rencontre avec ses joueurs, alors en deuxième division de rugby à XIII, se pose la question du vestiaire : "En sport collectif, les entraîneurs ont coutume d’aller et venir dans les vestiaires pour faire des discours et motiver leurs joueurs. Lors de notre premier temps d’échange, nous avons posé un cadre : avant chaque début de match, je leur demande d’être prêts et habillés à une heure précise, tandis qu’à la fin du match, je débriefe directement sur la pelouse ou je retourne au vestiaire où ils ont interdiction de se dévêtir tant que je suis en leur présence." 

Audrey Zitter n’a eu aucun souci à s’imposer face à ses joueurs. "Ils ont toujours respecté cette consigne. Ils ont très vite compris que je n’étais pas là pour faire de la figuration. Ce n’est pas votre sexe qui détermine votre capacité à être entraîneur, mais votre tempérament", commente la conseillère technique rattachée au ministère des Sports.

La Toulousaine s’est ensuite tournée vers la sélection française féminine de rugby à XIII. Fille ou garçon, elle ne fait aucune distinction : "J’ai posé les mêmes règles dans le vestiaire pour garder l’intimité des joueuses. Sur le terrain, je ne fais aucune différence entre homme et femme. J’ai essayé de m’adapter aux personnes et non au sexe. Chacun réagit différemment." Elle admet davantage de rapports fusionnels avec les joueuses : "J’étais plus dans la retenue avec les garçons, je ne m’autorisais pas de proximité physique".

Femmes dans le sport, de timides avancées

La cadre de la Fédération de rugby à XIII constate que de plus en plus de femmes investissent le milieu du sport. Mais Audrey Zitter met plusieurs bémols : "Nous restons loin du compte. Beaucoup de fédérations sont faites pour les hommes et nous demeurons très loin de la parité, y compris dans le rugby. Les femmes arrivent à se faire une place seulement si leurs supérieurs masculins l’acceptent et les soutiennent." Dans les fédérations, les licenciées et arbitres féminines restent en sous-effectif. La solution pour l’ancienne entraîneuse, faire jouer les quotas : "Il faut plus de femmes arbitres et entraîneuses pour essayer de rééquilibrer le rapport de force et montrer aux jeunes filles que c’est possible."

Le ministère des Sports, en collaboration avec les fédérations, tente de renforcer l’accès au sport des filles et promouvoir les femmes à des fonctions dirigeantes : "Nous œuvrons avec nos moyens, nous n’avons pas de baguette magique", reconnaît Audrey Zitter. Elle déplore manquer de levier : "Nous mettons en place des politiques volontaristes pour qu’elles s’engagent avec des licences féminines gratuites, des stages d’arbitrage, des conseils d’administration paritaires dans les fédérations… Les clubs doivent aussi se servir des équipes féminines qui obtiennent de bons résultats."

Le geste déplacé du président de la Fédération espagnole de football, pendant les festivités du titre de championnes du monde obtenu par les filles, fait réagir Audrey Zitter. "Des hommes se sentent toujours le droit et la légitimité d’avoir ces attitudes. Il faut passer par l’éducation pour les faire cesser et enrayer ce rapport de domination. Les personnes doivent se respecter pour ce qu’ils sont." La responsable technique pour la Fédération a conscience que ces gestes déplacés peuvent arriver dans le rugby : "C’est difficile de les éviter. Ce qui me rassure, c’est que les spectateurs ne ferment plus les yeux."

Audrey Zitter souhaite que les sportifs hommes et femmes soient représentés de la même manière dans la presse. "Le jour où la société ne sera plus surprise de voir une femme jouer un rôle de premier plan, nous aurons dépassé les clivages", conclut la formatrice.


Geoffrey LOPES

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