Martin Fourcade, monument du sport français, tire sa révérence à l'âge de 31 ans

par Hamza HIZZIR
Publié le 13 mars 2020 à 22h45, mis à jour le 14 mars 2020 à 7h58

Source : TF1 Info

LEGENDE - Martin Fourcade, quintuple champion olympique de biathlon, a annoncé ce vendredi dans un communiqué qu'il mettrait un terme à sa carrière à l'issue de la saison.

Quand une personnalité meurt, certaines personnes aiment ramener la chose à eux en publiant une photo en compagnie de l'illustre, ou en narrant une anecdote personnelle avec celui-ci, et certaines autres personnes n'aiment pas ça, y voyant un narcissisme confinant au morbide... Martin Fourcade n'est pas mort. Mais il a annoncé ce vendredi qu'il mettrait un terme à sa carrière à l'issue de l'actuelle saison, et l'expression consacrée qualifie un tel événement de "petite mort". Quoi qu'on en pense, l'auteur de ces lignes aimerait narrer, à cette occasion, une anecdote personnelle. Récemment cambriolé, j'avais demandé conseil à mes abonnés Twitter sur ce qu'il convenait de faire. Et, à ma grande surprise, il fut l'un des premiers à m'envoyer des messages privés, plutôt judicieux. Il ne me connaissait pas. Vous saisissez l'idée : Martin est un bon gars.

Fourcade est un immense champion, et les mots sont faibles. Il est le sportif français le plus titré de l'histoire des Jeux olympiques, été et hiver confondus, avec cinq médailles d’or et deux d’argent. Il est onze fois champion du monde individuel, sept fois vainqueur du classement général de la Coupe du monde de biathlon de 2012 à 2018, et cumule 82 victoires individuelles. Il est considéré comme l’un des plus grands biathlètes de l’histoire. Si ce n'est le plus grand.

Avec toute la classe qui le caractérise, celle qui le faisait encourager ses potes les rares fois où lui perdait, il s'est fendu, pour annoncer cette triste nouvelle, d'un texte puissant, où il a mis toutes ses émotions. "Il y a des décisions qui changent une vie. Je me suis souvent demandé si cela avait été le cas lorsque je suis monté sur les skis pour la première fois, il y a trente ans, dans mes Pyrénées natales. Je crois que j’ai plus simplement suivi cette trace dans la neige dessinée par mon frère Simon, comme beaucoup de petits frères... J’ai été encouragé par ces sensations de glisse et le bonheur d’évoluer dans cet environnement extraordinaire. J’ai aimé ça. Passionnément", embraye-t-il ainsi.

J’aurais pu m’arrêter au lendemain des JO 2018, auréolé de trois nouvelles médailles d’or, mais je devais encore suivre cette trace initiale.
Martin Fourcade

Il poursuit : "J’ai combattu et j’ai gagné. J’ai souffert, aussi. Je suis tombé et je me suis relevé. Surtout, j’ai grandi. En ayant la chance inouïe de voir grandir mon sport. Des audiences télé extraordinaires jusqu’aux succès populaires des Coupes du monde au Grand Bornand, j’ai vécu en France et ailleurs une merveilleuse ascension. Celle du sport que j’aime, à qui j’ai dédié une belle partie de ma vie, et qui en retour m’a tout donné." Un constat pudique : avant ses incroyables triomphes, personne, ou presque, en France, ne regardait de biathlon.

Il explique aussi la difficulté de durer, seulement possible, pour lui, à travers le collectif, avouant : "J’aurais pu m’arrêter au lendemain des Jeux olympiques 2018, auréolé de trois nouvelles médailles d’or, mais je devais encore suivre cette trace initiale. Elle m’a bien chahutée l’an passé, mais ces turbulences m’ont permis de grandir encore. J’ai dû faire l’expérience de cette notion de résilience jusqu’à engranger, le mois dernier, deux magnifiques titres supplémentaires aux championnats du monde. Seul d’abord, et surtout avec l’équipe de France. Avec Émilien (Jacquelin) , Quentin (Fillon Maillet) et Simon (Fourcade, son frère), avec Fabien (Claude) et Antonin (Guigonnat). Avec toute l’équipe. Grâce à tous ceux qui nous ont précédés et pour tous ceux qui nous suivront." Le sport en héritage, comme ce témoin qu'il a tant transmis durant les relais.

"J’ai beaucoup pleuré en écrivant ce communiqué"

"Rebondir pour en arriver là, à ces moments de bonheur partagés, fut le plus grand défi de ma carrière. Je crois que cette dernière mission a été accomplie, quelle que soit l’issue de cette saison. Ma volonté de donner le meilleur de moi-même et de gravir des montagnes est toujours présente mais la suite de ma construction en tant qu’homme, en tant que père, doit désormais passer par d’autres voies, d’autres supports d’expression. La passion que je voue à mon sport est intacte. Mon amour pour le sport en général, et les valeurs de dépassement de soi et de respect des autres qu’il transmet, est plus grand que jamais. C’est dans cet univers que je veux continuer à m’exprimer, à m’investir, à partager", écrit-il enfin, concernant l'avenir. Avant de concéder, ce vendredi soir sur La chaîne L'Équipe : "J’ai beaucoup pleuré en écrivant ce communiqué."

Pudeur, dignité, humilité, élégance. La carré magique. Et comme dans toutes ces histoires semblant trop belles pour ne pas être sorties de l'imagination d'un enfant, il y a un ultime symbole, un de ces clins d'oeil que le Destin sait faire : c’est à Kontiolahti, en Finlande, le 14 mars 2010, que Martin Fourcade avait signé sa première victoire en Coupe du monde, et c’est sur cette même piste samedi, le 14 mars 2020, soit dix ans après, jour pour jour, que Martin Fourcade mettra fin à son aventure sportive. Peut-être le champion a-t-il fait exprès de choisir cette date. Une certitude : il n'y aura personne pour en dire du mal.


Hamza HIZZIR

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