CLASH – Un mois après avoir été assaisonné par son ancien capitaine en équipe de France dans Le Parisien, Christophe Dugarry a répondu sévèrement à Didier Deschamps au micro de RMC, lundi 20 août. D'où vient cette inimitié entre les deux hommes ?
La Coupe du monde posée sur la table devant lui, ses 23 joueurs en cercle tout autour, la toute première phrase prononcée par Didier Deschamps dans son discours, tenu dans la touffeur euphorique des vestiaires du stade Loujniki dimanche soir après la finale contre la Croatie (4-2), a été la suivante : "Vous serez liés à vie par ce titre de champion du monde." Sauf que, cinq jours plus tard, dans les colonnes du Parisien, le sélectionneur des Bleus avait démontré le contraire en taclant à la gorge son ancien coéquipier Christophe Dugarry, avec il avait pourtant remporté le même trophée en 1998.
Si on devait se voir avec Duga, ça ne serait même pas bonjour, bonsoir.
Didier Deschamps
"Quand on franchit la ligne blanche et qu’il n’y a pas un minimum de respect sur le plan humain... C’est fini avec lui. Dugarry ose dire que je prends la France en otage. Cela dépasse l’entendement. Il dit ce qu’il veut, il a son émission radio. On a vécu des choses ensemble donc je sais qu’en termes d’état d’esprit, sincèrement, j’ai vu beaucoup mieux. Mais bon, ce n’est pas grave. J’ai bientôt 50 ans et je ne fais plus semblant, a asséné Didier Deschamps. Si on devait se voir avec Duga, ça ne serait même pas bonjour, bonsoir. Chacun sa route, chacun son chemin. C’est clair."
Une déclaration qui sera restée un mois sans réponse, Christophe Dugarry ne reprenant du service que le 20 août sur RMC. L'ancien attaquant des Bleus ne s'est pas fait prier pour réponde aux invectives du sélectionneur... par l'invective : "Deschamps, on lui manque de respect dès qu’on n’est pas d’accord avec lui. Il fait la pluie et le beau temps dans le football français. [...] Bravo Didier Deschamps, tu es le plus grand, le plus fort, le plus beau. Je ne suis pas prêt à tout faire pour gagner. Je suis ravi de ne pas avoir le même état d’esprit. Qu’il ne veuille plus me dire bonjour, ça ne changera pas ma vie, ça ne changera pas la sienne."
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Pourquoi une attaque d’une telle violence ? Il faut d’abord noter que le sélectionneur fait ici référence à une déclaration précise de son ancien coéquipier. Lequel avait lancé, dans le cadre de l’émission qu’il présente sur RMC, le 28 mai dernier : "Il faudra que Didier Deschamps aille très loin en Coupe du Monde. Parce qu'il faudra assumer son choix. Parce qu'on prend en otage l'équipe de France et c'est peut-être au détriment de l'intérêt collectif. Quand on a un avant-centre qui remporte quatre Ligues des Champions qui ne joue pas en équipe de France parce qu'il a mal parlé de Deschamps... Je valide la liste des 23 mais je trouve ça dommage que Benzema n'en fasse pas partie."
Duga : "Ne pas prendre Benzema, c'est le choix de Deschamps, mais c'est peut-être au détriment de l'intérêt collectif" pic.twitter.com/PqIVasBGLI — Team Duga (@TeamDugaRMC) May 28, 2018
C’est ce terme de "prise en otage" qui, en l’occurrence, a conduit Didier Deschamps à répliquer en citant nommément Christphe Dugarry. Tout auréolé d’un titre de champion du monde lui donnant forcément raison, le sélectionneur a ainsi entrepris de mettre l’affaire sur la place publique. Mais le conflit date en fait d’il y a un an. Au moins.
Quand un consultant parle chaque jour de tout et de tout le monde, forcément, il est obligé de raconter des conneries.
Didier Deschamps
Dans le livre Nous l'avons tant aimée 1998-2018 : la Coupe du monde racontée par ceux qui l'ont gagnée, paru en novembre 2017 (ed. Hugo Sport), se trouve en effet un entretien avec Didier Deschamps. Et, à une question portant sur la reconversion dans les médias de certains champions du monde 1998, le sélectionneur livre une réponse cinglante qui cible très vraisemblablement Christophe Dugarry, même s’il ne le nomme pas. Contacté par LCI, le journaliste Denis Chaumier, auteur de l'interview, précise que l'interview a eu lieu le 12 juillet 2017 à Monaco.
"J’ai été consultant à un moment de ma vie, mais j’ai pratiqué cette activité à ma façon, y dit Didier Deschamps. Aujourd’hui, on réclame peut-être un autre type d’intervention aux consultants. Je ne vais pas dire que je m’en fiche mais, parfois, je rigole. Il m’arrive de remettre certains de mes anciens partenaires devant les réalités : ‘Mais dis-moi, tu as totalement oublié comment tu étais lorsque tu jouais ? Tu ne te souviens plus ? Tu as la mémoire qui flanche ?’ Quand un consultant parle chaque jour de tout et de tout le monde, forcément, il est obligé de raconter des conneries. Et c’est ce qui se passe."
Dans le livre de @DenisChaumier sur les 20 ans de 1998, Didier Deschamps parle de ses ex-coéquipiers devenus consultants et leurs « conneries » pic.twitter.com/VyLjM7QUJ3 — Hamza Hizzir (@HamzaHizzir) April 8, 2018
Didier Deschamps faisait alors clairement référence au passé de joueur de Christophe Dugarry, conspué sur tous les terrains de France parce que jugé trop mauvais pour mériter d’être chez les Bleus. Quand l’ex-attaquant avait inscrit le premier but tricolore du Mondial 1998, il avait ainsi tiré la langue en direction de la tribune de presse, pour signifier qu’il jugeait les médias responsables de la cabale contre lui. Ce qui n’a pas empêché le même de déclarer à la radio, le 29 mai dernier : "On ne peut pas être champion du monde avec Giroud." Une phrase qui avait aussi agacé le sélectionneur, puisqu’elle s’inscrivait dans le même lobbying du consultant pour un retour de Benzema en sélection. Dugarry avait, du reste, présenté des excuses dès le lendemain. Mais, visiblement, le mal était fait. Pour de bon.