EQUIPE DE FRANCE - Après leur élimination en quarts de finale de la Coupe du monde 2014, les joueurs avaient tous expliqué leur défaite face à l’Allemagne par un manque d’expérience. A l’heure de retrouver la Mannschaft jeudi en demi-finales de l’Euro 2016, il est désormais plus que temps de se demander si ce déficit a été comblé. Metronews a interrogé plusieurs Bleus.
Les chiffres ne résumeront jamais le football, mais les mathématiques demeurent une discipline incontournable. Le problème est le suivant : si l’équipe de France a été éliminée par l’Allemagne en quarts de finale de la Coupe du monde 2014 en raison d’un déficit d’expérience (l’argument alors avancé par tous les joueurs interrogés), et si les Allemands ont à peu près conservé le même groupe et pris deux ans de bouteille, les Bleus ne risquent-ils pas de se heurter au même obstacle, jeudi, à Marseille, contre la Mannschaft, en demi-finales de l’Euro 2016 ? Evidemment, et heureusement (pour nous), l’affaire est un peu plus compliquée que cela, comme nous l’expliquent les joueurs auxquels metronews a posé cette question.
"Je vous rappelle qu'on a rejoué l’Allemagne et qu'on l’a battue (2-0, le 13 novembre dernier, ndlr), même si les gens diront encore que c’était un amical, que les Allemands étaient en vacances (ironique). On peut dire tout ce qu’on veut mais je sais que cette équipe de France a beaucoup plus confiance en elle maintenant, nous a lâché Patrice Evra quelques jours avant le début de l'Euro. Personnellement, je n’ai pas passé de bonnes vacances d’été en 2014, parce que j’étais tellement persuadé de lever cette Coupe... On se sentait déjà forts à l’époque. Bien sûr que ça s’est joué à l’expérience, à la façon d'aborder le match, de considérer qu’après avoir pris un but, tu peux quand même encore gagner. Ça nécessite de jouer beaucoup de matchs de haut niveau."
A LIRE AUSSI >> Patrice Evra : "Les gens aiment notre style"
Pour Hugo Lloris, il convient de tenir compte du contexte du match à venir. "Ils ont toujours plus d’expérience que nous, et ce dans toutes les lignes. Ils ont tous l’habitude de jouer des demies, des finales de Ligue des champions. Ils ont également cette expérience commune de la Coupe du monde, qu’ils ont gagnée. A ce stade de la compétition, ces détails compteront. Après, on n’a pas à se cacher, au contraire. On est à domicile, on a ce qu’il faut, dans tous les secteurs. Et en demi-finale, le mental sera vraiment très important, affirme le capitaine. Il ne faut pas avoir peur. On a du respect mais on a envie de mener cette bataille. Depuis le départ, on a tous envie de montrer notre meilleur niveau. Il y a eu des pièges jusqu’à présent, on les a évités. Maintenant, on va jouer face à plus gros et il faut continuer à se lâcher. Le fait de jouer à domicile doit nous donner un avantage."
Dire qu’il ne faut pas avoir peur revient à dire que les Bleus avaient eu peur au Maracana de Rio. Ou du moins qu’ils ne croyaient pas sincèrement en leur chance. "Il faut garder notre élimination d’il y a deux ans dans un coin de notre tête. C’était un match très serré, très tendu. Les grands matchs se jouent sur des détails. On va donc redoubler d’attention pour ne pas les laisser déployer leur jeu et prendre confiance contre nous. Surtout, il faudra faire un bon début de match. Il ne manquait pas grand-chose au Mondial. Mais ce pas grand-chose leur avait suffi. J’en garde le souvenir d’un match un peu frustrant", rembobine Olivier Giroud, évoquant une nouvelle fois ce "pas grand-chose" qu'on appelle l’expérience.
A LIRE AUSSI >> Hugo Lloris : "Il ne faut pas avoir peur de l’Allemagne"
Mais c’est quoi, au juste, l’expérience ? "En clair, c’est comment tu gères la pression, détaille Patrice Evra. Par exemple, si tu commences un match avec un gilet de 30 kilos, tu ne vas pas courir vite, tu vas être fatigué. Donc, l'expérience, ça consiste à savoir enlever ce gilet avant le match. Moi, je préfère même les jeunes quand ils sont insouciants. C’est ça que j’aime." Une insouciance qu’on a retrouvée dans le discours de Kingsley Coman, 20 ans, qui n’était pas au Brésil : "C’est la compétition : si on veut la remporter, normal de devoir battre de grosses nations. Ce serait grave de penser qu’on n’est pas de taille. Ils ont des arguments, on en a aussi. Ce sera à nous de tout donner. Pour l’instant, notre Euro n’est pas réussi. On a été loin mais on n’a pas affronté de grosses nations. Et justement, on aura à cœur de montrer que, face à une grosse nation, on peut être meilleurs."
A LIRE AUSSI >>
Blaise Matuidi : "Face à l’Allemagne, on a des armes à faire valoir"
Pourtant, Olivier Giroud, lui, semble croire que la valeur attend le nombre des années : "On est un peu plus jeunes, donc je ne sais pas si on a acquis l’expérience nécessaire... En tout cas, on a un super groupe qui vit bien ensemble depuis deux ans, même depuis plus longtemps pour certains. Et on réalise de belles choses. Donc on a de bonnes raisons d’espérer. Maintenant, l’Allemagne est une équipe très expérimentée, même si leur moyenne d’âge se situe à moins de 30 ans. Ils doivent être à 27 ou 28 ans je crois, et on dit que c’est le meilleur âge dans une carrière." C’est un paradoxe que pointe là, malgré lui, l’attaquant d’Arsenal. Les 23 Bleus affichent une moyenne d’âge de 27,6 ans, alors que l’Allemagne est en fait la plus jeune des équipes engagées dans cet Euro, avec une moyenne de 25,81 ans.
On parle donc ici de vécu plutôt que d’âge. "Notre groupe a mûri. Beaucoup de nos joueurs évoluent dans de grands clubs et, maintenant, ils sont aussi incontournables au sein de leur équipe. Cette maturité a fait éclore beaucoup de leaders. On parle beaucoup de moi comme d'un leader, mais en vrai, on en a 23", avance Patrice Evra. Pour qui "le déficit d’expérience sera encore là jeudi. Mais ce que je veux dire, c’est que nos jeunes ont mûri. Ils sont jeunes, sur le papier, mais ils sont conscients de leurs responsabilités. De toute façon, je n'arrête pas de leur répéter : ‘Comme on parle de vous, vous avez intérêt à nous faire, nous les vieux, gagner l’Euro. La pression, elle est sur vous.’ J’espère qu’ils vont assumer. Parce que les choses sérieuses commencent maintenant". Une manière de reconnaître que, pour les Bleus, elles n’avaient pas vraiment commencé au Brésil.