"Chaos total" en marge de Nice-Cologne : trois questions sur ce match qui a failli être annulé

Publié le 9 septembre 2022 à 17h19, mis à jour le 11 septembre 2022 à 17h21

Source : JT 13h Semaine

De violents incidents ont éclaté en amont de la rencontre de Ligue Europa Conférence, entre Nice et Cologne (1-1), jeudi 8 septembre.
Trois enquêtes ont été ouvertes, alors que le lourd bilan de ces bagarres d'une violence extrême fait état de 39 blessés.
Retour sur ces tristes événements qui ont pris le pas sur le football.

Le chaos total. La honte absolue. Jeudi 8 septembre, l'Allianz Riviera a été le théâtre d'un déferlement insensé de violence, en amont du match de Ligue Europa Conférence, opposant l'OGC Nice au FC Cologne. Ces graves incidents, débutés dans le centre-ville de Nice, se sont propagés jusqu'au parvis du stade, avant de se poursuivre à l'intérieur de l'enceinte. Au moins 39 blessés sont à déplorer, dont un grave après une chute de cinq mètres entre deux niveaux de tribunes. Si la rencontre, un temps menacée, s'est quand même jouée, le coup d'envoi a été donné avec près d'une heure de retard (19h40 au lieu de 18h45). Disputée dans une ambiance pesante, mais sans heurts, la partie s'est finalement conclue sur un score nul (1-1).

Un résultat anecdotique au regard de ces scènes terrifiantes, d'une tristesse effroyable, que l'on espérait ne plus revoir en marge d'un match de football. "C'est décevant, rageant de voir ça. Cela ne devrait pas exister. (...) Je n'ai jamais vu ça", s'est ému le coach niçois Lucien Favre. "Ce n'est pas possible de voir de telles choses." "C'est un vrai scandale. C'est très triste et difficile de voir ça", a déploré pour sa part l'entraîneur adjoint de Cologne André Pawlak. "Je n'ai jamais vécu quelques chose comme ça à Cologne depuis que je suis dans le football. Et en Allemagne, cela fait très longtemps qu'on n'a pas vu ça."

Que s'est-il passé ?

Cette journée à oublier s'est déroulée en deux temps. Dans la centre-ville d'abord. Vers 13h, à quelques heures avant le coup d'envoi, un cortège de supporters du FC Cologne s'étaient donnés rendez-vous place Masséna, là où bat le cœur de la cité azuréenne. Mais la fête a été rapidement gâchée. La joyeuse marée de maillots rouges, fortement alcoolisée, a tout saccagé sur son passage : la boutique de l'OGC Nice a été vandalisée, les tramways tagués, les monuments abîmés… Comble du sinistre, le mémorial des victimes de l'attentat du 14 juillet 2016 a été recouvert d'autocollants à l'effigie du club visiteur.  Des dégradations chiffrées à plusieurs milliers d'euros par la ville de Nice, qui a promis "d'envoyer la facture" au club allemand. 

Une heure avant le coup d'envoi, prévu à 18h45, la situation a dégénéré du côté de l'Allianz Riviera. Plusieurs dizaines de supporters de Cologne, cagoulés, ont traversé la tribune présidentielle Ségurane pour en découdre avec leurs adversaires niçois, placés dans la tribune populaire Sud. "Ce sont les Allemands qui ont chargé", a assuré la préfecture des Alpes-Maritimes, interrogée par l'AFP. S'est ensuivi une grosse dizaine de minutes d'affrontements d'une violence inouïe, durant lesquelles des sièges et des barres de fer ont été arrachés pour servir d'armes. Seule l'intervention musclée des forces de l'ordre a permis de retrouver le calme. Pour contenir ces débordements, les portes du stade avaient été momentanément fermées.

À qui la faute ?

Comment a-t-on pu en arriver là ? Y a-t-il eu des défaillances ? Et si oui, lesquelles ? Alors que 650 policiers et gendarmes avaient été déployés, ainsi que 600 stadiers, selon la préfecture, tout porte à croire que les forces de l'ordre ont été "complètement dépassées". Selon des policiers, contactés par RMC Sport, le dispositif "n'était pas assez conséquent" pour un match "annoncé comme tendu". Par ailleurs, un agent de sécurité a constaté qu'ils ont mis "beaucoup de temps" à intervenir. 

Sur Twitter, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a promis de faire le point avec le ministère de l'Intérieur "sur les faits et responsabilités derrière". "Il y en a marre, il y en a vraiment marre que notre sport soit sali de cette façon, qu'on ne puisse plus se dire qu'on va avec ses gamins de manière sereine et sécurisante dans un stade", a-t-elle réagi. "J'ai l'estomac noué parce que ça recommence, Nice-Cologne, avec des violences inouïes, des images choquantes sur les réseaux sociaux."

Qui est à blâmer pour ces incidents ? "On sait tous que vous n'y êtes pour rien", avait lancé le capitaine niçois Dante, venu parler à ses supporters au pied de la tribune populaire Sud, en amont de la rencontre. "Nos supporteurs n'ont rien à se reprocher", a répété à chaud l'entraîneur Lucien Favre. Le président du FC Cologne Werner Wolf s'est lui contenté de "condamner avec la plus grande fermeté les événements odieux s'étant produits des deux côtés". Il est toutefois assuré que, parmi les fauteurs de trouble, des individus, se revendiquant supporters du PSG, se sont infiltrés dans le parcage visiteur.  

C'est le cas du hooligan, "très alcoolisé", qui a chuté de cinq mètres entre deux niveaux de tribunes, et dont le pronostic vital n'est, à cette heure, plus engagé. L'homme appartient aux "Supras Auteuil", un groupe de supporters parisiens officiellement dissous depuis 2010, mais proche de la "Wilde Horde", les Ultras de Cologne. Ses membres "ne sont pas reconnus comme supporters du PSG et sont interdits d'accès au Parc des Princes", a rappelé le club de la capitale dans un communiqué, se disant prêt à étudier " les suites à donner aux atteintes portées à sa réputation par les agissements de ces derniers. "

Quelles suites et quelles sanctions ?

À ce stade, il n'y a eu aucune interpellation, "mais des enquêtes seront diligentées avec notamment un travail d'analyse de la vidéo" pour mettre un nom et un visage sur les supporters responsables, a déclaré à l'AFP, vendredi 9 septembre, le procureur de la République de Nice Xavier Bonhomme. Dans ce contexte, trois enquêtes ont été ouvertes, notamment pour les chefs de "violences en réunion" et "dégradations en réunion", a indiqué le parquet de Nice. "Ces enquêtes, toutes confiées à la sûreté départementale de Nice, ont pour but d'identifier et d'interpeller les auteurs de ces infractions", a précisé le magistrat.

Se pose aussi des conséquences sportives. L'UEFA devrait ouvrir une enquête sur les violences causées par quelques dizaines d'individus à l'Allianz Riviera. Le FC Cologne, déjà sanctionné la saison passée, après les incidents ayant émaillé la rencontre de Ligue Europa contre Arsenal, pourrait écoper d'une interdiction de déplacement de ses supporters. La Commission de discipline de l'instance européenne pourrait sévir plus durement en infligeant au club allemand un huis clos total ou partiel à domicile pour plusieurs matchs, comme le prévoit le règlement. "Les sanctions sont probables, oui", a reconnu l'attachée de presse du club allemand Lil Zercher. "On va analyser ça ultérieurement et on communiquera en temps utile."

L'OGC Nice pourrait mieux s'en tirer, à condition que l'enquête de l'UEFA ne mette pas à jour des manquements d'organisation et de sécurité. "Je ne crains pas de suspension de stade. Ce serait trop injuste", a estimé le coach niçois Lucien Favre. Son président, Jean-Pierre Rivère, s'est lui dit lassé par ces nouveaux débordements. "Quand vous vivez ça en direct, c'est terrible. Quand le lendemain matin vous le revivez une deuxième fois en revoyant les images, c'est encore pire. Ce n'est plus possible", a-t-il pesté en conférence de presse, espérant toutefois que Nice en sortira indemne. "On voit que ce sont les Allemands qui ont attaqué. Heureusement que certains stadiers de chez nous les ont bloqués. J'espère qu'on n'aura pas de sanctions. J'espère."


Yohan ROBLIN

Tout
TF1 Info