Gennaro Gattuso à l'OM, une nomination qui pose question

Publié le 27 septembre 2023 à 19h58

Source : Sujet TF1 Info

À la recherche d'un entraîneur, après la défection de l'éphémère Marcelino, Pablo Longoria a trouvé chaussure au pied de l'OM.
Gennaro Gattuso, un temps proche de signer à Lyon, a convaincu le président olympien de lui donner les clés de l'équipe phocéenne.
Un choix qui interroge au vu du pedigree de l'ancien "pitbull de Milan".

Il était, dit-on, la priorité de Pablo Longoria. En quête d'un successeur à Marcelino, qui a quitté la Canebière dans un bruit de vaisselle cassée, après une réunion houleuse avec des supporters, Marseille a prospecté pendant plusieurs jours, sondant même Christophe Galtier, avant d'arrêter son choix sur Gennaro Gattuso. L'ancien aboyeur du Milan AC est arrivé à Marseille, mercredi 27 septembre, où il a paraphé son contrat. Après avoir dirigé son premier entraînement, l'entraîneur italien de 45 ans devrait s'installer sur le banc olympien, samedi 30 septembre, à Monaco. "Je suis très heureux et fier de rejoindre l’Olympique de Marseille. [...] J’ai hâte de me mettre au travail avec mon nouveau groupe et de relever les prochains défis qui nous attendent", s'est-il réjoui sur le site du club

Joueur puis coach au caractère volcanique, "Ringhio" (son surnom, que l'on peut traduire par "grognement" en français) débarque dans la cité phocéenne, avec la mission d'éteindre l'incendie qui couve à l'OM. "On a manqué de caractère", regrettait Pancho Abardonado, qui assure l'intérim depuis le départ de Marcelino, après la gifle reçue contre le PSG (4-0) lors du Classique, le week-end dernier. Un manque de personnalité que peut corriger le champion du monde 2006 avec la Squadra Azzurra, réputé pour sa gouaille. Néanmoins, sa nomination interroge dans un contexte de crise profonde. 

Un entraîneur qui ne fait que passer

Annoncé à Lyon, avant que les Gones ne se rabattent sur son compatriote Fabio Grosso, Gennaro Gattuso a donc accepté de poser ses valises à Marseille. Mais pour combien de temps ? Nul le sait vraiment, pas même lui. Et pour cause, depuis qu'il a débuté sa carrière d'entraîneur en 2013, "Rino" a écumé les bancs de touche européens. En dix ans, il a connu huit clubs (Sion, Palerme, OFI Crète, Pise, Milan, Naples, Valence). Pour la faire courte, l'ancien coach de Valence n'est jamais resté plus de deux ans à la tête d'un club qu'il a dirigé. À Milan (2017-2019) et à Naples (2019-2021), ses deux plus longues expériences, où il avait été appelé pour jouer le pompier de service (tiens donc), il a pris la porte à chaque fois après 18 mois.

S'il a dépoussiéré son armoire à trophées, en soulevant une Coupe d'Italie avec le Napoli en 2020, son seul titre en tant qu'entraîneur à ce jour, il s'est surtout distingué par son instabilité. Son passage express à la Fiorentina à l'été 2021 en est la parfaite illustration. Mécontent du mercato florentin, il avait claqué la porte du club au bout de 23 jours seulement, sans avoir dirigé le moindre match. Un côté imprévisible qui a de quoi inquiéter, mais dont Longoria a fait fi, lui qui est habitué à user un entraîneur par saison (Jorge Sampaoli et Igor Tudor). Entre eux, c'est déjà écrit : ce n'est pas fait pour durer. 

Un caractère bien (trop ?) trempé

Mais, dans le climat marseillais actuel, Pablo Longoria a opté pour un homme à poigne, qu'il juge en mesure de résister à la pression inhérente au fait d'entraîner un club tel que l'OM. Vanté pour sa proximité avec ses joueurs, Gattuso n'aura pas de mal à se faire respecter et écouter du vestiaire phocéen. Il faudra néanmoins que son groupe soit bien accroché. Capable de dégoupiller à tout moment, ce "chien fou" n'hésite pas à torpiller ses joueurs ou à les virer quand il juge que c'est mérité. Son caractère orageux, qui était déjà sa marque de fabrique lorsqu'il piétinait ses adversaires sur les terrains, risque de faire des étincelles. C'est d'ailleurs ce qui a refroidi les dirigeants lyonnais d'aller plus loin dans les négociations. 

Armé pour faire face à la presse, avec des célèbres saillies qui ont fait le tour des réseaux sociaux (voir ci-dessus), "Rino" n'est pas du genre à se dégonfler tant que le bateau tangue. Transparent, direct et humain. Peut-être ce dont a besoin l'OM, après Marcelino, pour remettre de l'ordre dans le club. En contrepartie, Longoria devra veiller à ne pas froisser l'ex-international connu pour n'en faire qu'à sa tête. Sean Connery, le mythique interprète de James Bond, en a été témoin lors de son passage aux Glasgow Rangers en 1997-1998. "Quand j'ai décidé de quitter le club, Sean Connery (membre du conseil d'administration, ndlr) a essayé de s'y opposer, mais je lui ai dit de se mêler de ses affaires", avait raconté Gennaro Gattuso en 2020.

Des accusations qui font tâche

S'il a beau craindre "dégun" ("personne", en parler marseillais), "Ringhio" traîne des casseroles, qui risquent de rafraîchir les supporters de l'OM. Outre le "gagner moche", qu'il revendique - "On ne peut pas être toujours Brad Pitt", clamait-il en 2018 - avec un jeu qui repose sur un bloc bas resserré, et l'influence (dangereuse ?) de son conseil Jorge Mendes, qui pratique le transfert-lié (il place les joueurs de sa galaxie dans les clubs où sont ses entraîneurs), son image publique est entachée.

Convoité par Tottenham en 2021, Gattuso n'a finalement pas eu la poste en raison d'une campagne massive des fans du club londonien sur les réseaux sociaux qui étaient opposés à sa venue. Un hashtag #NoToGattuso avait émergé, avec lequel des supporters des Spurs avaient déterré certaines de ses anciennes déclarations, à l'instar de son rejet du mariage homosexuel, sa vision misogyne sur la place des femmes dans le football ou des prises de position jugées racistes. 

"Il n'a pas été engagé par Tottenham pour ses commentaires contre les femmes, les homosexuels ou les joueurs noirs", l'avait accusé, l'été suivant, l'ancien vice-président de Valence, Miguel Zorio, alors qu'il était sur le point de rejoindre le club Che. "Mon histoire parle pour moi. Être raciste, homophobe, xénophobe, sexiste ? Mais, sommes-nous fous ?", avait rétorqué Gennaro Gattuso dans les colonnes de La Gazzetta dello Sport. Et de conclure plus que maladroitement : "Moi raciste ? Alors pourquoi aurais-je acheté (Tiemoué) Bakayoko quand j'étais à Naples ? Je n'ai jamais rien eu contre les joueurs noirs, beaucoup d'entre eux ont été mes coéquipiers et sont mes amis." Nul doute que les Marseillais ne passeront pas ça sous le tapis.


Yohan ROBLIN

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