SANTÉ MENTALE - Après son abandon au concours par équipes la veille, la quadruple championne olympique Simone Biles s'est retirée, mercredi 28 juillet du concours général, programmée jeudi. La superstar américaine de gymnastique souhaite préserver son bien-être.
Elle se retire pour préserver sa santé mentale. Au lendemain de son retrait la compétition par équipes des JO de Tokyo, la gymnaste américaine Simone Biles a déclaré forfait, mercredi 28 juillet, pour le concours général, prévu jeudi, a indiqué la Fédération américaine de gymnastique sur son compte Twitter. "Nous soutenons de tout cœur la décision de Simone et saluons sa bravoure en priorisant son bien-être. Son courage montre, encore une fois, pourquoi elle est un modèle pour tant de personnes", a annoncé USA Gymnastics. La question de sa participation à ses quatre autres finales se décidera jour par jour.
Icône au-delà de son propre sport, la quintuple médaillée olympique (dont quatre titres à Rio en 2016) était parvenue à se qualifier pour les six finales au programme à Tokyo, un exploit rarissime. Mardi 27 juillet, après avoir raté son premier mouvement au saut, un premier signe avant-coureur, celle qui est considérée comme la plus grande gymnaste de tous les temps a craqué. Elle a renfilé son survêtement avant de s'éclipser brièvement de l'Ariake Gymnastics Centre. Elle est ensuite revenue aux côtés de ses coéquipières pour leur expliquer la raison de son abandon, avant de s'assoir pour les encourager.
Si sa décision a pu surprendre, dans un premier temps, Simone Biles s'est justifiée, plus tard devant la presse, en expliquant devoir "faire face à ses démons" et "ne plus avoir autant confiance" que par le passé, ni prendre "autant de plaisir qu'avant". "Je sais que ce sont les Jeux, je voulais les faire pour moi seule (elle s'arrête pour pleurer, ndlr), mais j'y participe en fait pour d'autres que moi. Cela me fait mal au plus profond de moi que faire ce que j'aime m'ait été enlevé", a regretté la championne, médaillée d'argent à Tokyo de l'épreuve par équipes. "Je dois faire ce qui est bon pour moi et me concentrer sur ma santé mentale et ne pas compromettre ma santé et mon bien-être, c'est pourquoi j'ai décidé de prendre du recul."
La détresse des sportifs en lumière
Longtemps invincible, la "GOAT" de sa discipline, acronyme de "Greatest of all time" (la meilleure de tous les temps, en anglais), a dévoilé sa fragilité en pleine lumière. Avant les Jeux, elle avait déclaré avoir "l'impression de porter le poids du monde sur (ses) épaules". Une pression psychologique qui a rattrapée et submergée la petite bombe texane (1,42m, 47 kg) lors du concours général par équipes. Arrivée au sommet de la gymnastique, l'Américaine de 24 ans a surmonté bien des épreuves dans sa vie. Placée en famille d'accueil dans son enfance, elle a été agressée sexuellement à l'adolescence. Elle a été victime du pédocriminel Larry Nassar, l'ex-médecin de l'équipe féminine, condamné en 2018 pour abus sexuels.
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La décision de Simone Biles de protéger sa santé mentale, deux mois après le retrait de Naomi Osaka à Roland-Garros, lui a valu le soutien de nombreux sportifs à travers le monde. Elle a surtout permis de remettre la détresse psychologique des sportifs de haut niveau sur le devant de la scène. De grands noms du sport - Michael Phelps, Ian Thorpe, Mark Cavendish... - ont confié avoir souffert de dépression ou d'anxiété. S'ils s'en sont sortis, ce n'est pas le cas de tous. Dix ans après le gardien allemand Robert Enke, la cycliste américaine Kelly Catlin, médaillée d'argent à Rio en poursuite par équipes, s'est suicidée, à 23 ans, en mars 2019. Plus récemment, le 24 novembre 2020, le rugbyman Christophe Dominici, qui avait exposé ses "bleus à l'âme" dans un livre, est décédé brutalement. La thèse du suicide est privilégiée.
"De nos jours, je pense que les questions sur la santé mentale dans le sport sont plus fréquentes. Ce n'est plus comme si on pouvait tout mettre de côté, il faut aussi se concentrer sur soi-même, car, en fin de compte, nous sommes aussi humains, nous devons protéger notre esprit et notre corps, plutôt que de faire ce que le monde attend de nous", a rappelé Simone Biles. "Ce que j'ai décidé montre le pouvoir des sportifs, je me suis assurée que je protégeais ma santé mentale et mon bien-être, je ne voulais pas risquer de me faire mal ou de faire quelque chose de stupide" Les sportifs sont des héros, mais pas des super-héros.