Une étude suédoise publiée dans les colonnes de Lancet Public Health pointe les risques accrus de démence des footballeurs, par rapport au reste de la population.Seuls les gardiens de but sont épargnés par la survenue précoce de ces troubles dégénératifs.
Depuis plusieurs années, la question des risques sur la santé des sportifs de haut niveau, notamment après leur carrière, revient de plus en plus fréquemment au cœur de l'actualité. L'intensité, les rythmes de travail et les chocs sont tels que plusieurs chercheurs mettent en garde sur les dangers à long terme, aussi bien sur le plan physique que psychologique. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si un "protocole commotion" a été instauré puis développé, même s'il est encore largement perfectible, dans certains sports comme le rugby.
Mais le travail en la matière, pour réussir à concilier performance et protection des joueurs, reste immense. Témoin de ce système encore lacunaire : les footballeurs ont un risque plus élevé que la population générale de développer une démence. C'est ce que révèle une nouvelle étude suédoise d'envergure, publiée le 16 mars dernier dans la revue scientifique The Lancet Public Health. Celle-ci apporte "une preuve convaincante" du lien entre le sport le plus populaire au monde - pratiqué en compétition par 265 millions de personnes dans plus de 200 pays - et ce type de troubles cérébraux.
Un risque 1,5 fois plus élevé
Les chercheurs sont parvenus à une telle conclusion après avoir analysé les dossiers médicaux de plus de 6000 joueurs ayant évolué en première division suédoise de 1924 à 2019, dont environ 500 gardiens de but. Ils ont ensuite comparé le taux de survenue de troubles dégénératifs du cerveau de cet échantillon à celui de 56.000 Suédois. Il en ressort que les joueurs de football ont un risque 1,5 fois plus élevé qu'une personne lambda de développer des maladies comme Alzheimer ou d'autres types de démence.
"Cette recherche conforte l'hypothèse selon laquelle le jeu de tête explique ce lien" entre football et maladies cérébrales, souligne le principal auteur de l'étude*, Peter Ueda, du Karolinska Institutet suédois, à l'AFP. D'ailleurs, les scientifiques notent que les gardiens de but font exception, étant donné qu'ils n'effectuent habituellement pas de tête, alors même qu'ils "partagent avec les joueurs de champ des spécificités propres aux footballeurs". En revanche, le délai d'occurrence théorique entre la carrière du joueur et la survenue des symptômes étudiés est, généralement, très long.
Nous devons agir pour protéger la tête et le cerveau des joueurs afin que le jeu se poursuive
Pr Gill Livingston
Pour les experts, de meilleurs équipements, formations et entraînements permettraient, dans une certaine mesure, de rendre le football plus sûr pour les joueurs professionnels modernes. "Mais on peut aussi imaginer que les joueurs actuels sont exposés à un football intense dès le plus jeune âge, et qu'ainsi le risque est encore plus élevé pour eux", notent-ils. "Nous devons agir pour protéger la tête et le cerveau des joueurs afin que le jeu se poursuive", abonde le Pr Gill Livingston, professeur en psychiatrie pour les personnes âgées au University College de Londres et qui n'a pas participé à cette étude.
Au contraire, les données ne témoignent d'aucun risque accru pour les joueurs de football de développer des maladies neuromotrices, comme la maladie de Charcot (ALS). Mieux, elles dénotent même une plus faible incidence de la maladie de Parkinson. En outre, les joueurs professionnels auraient une espérance de vie légèrement supérieure à la moyenne, ce qui s'expliquerait par une meilleure forme physique et un statut socio-économique plus élevé des individus concernés.
En 2019 déjà, des chercheurs écossais suggéraient que les footballeurs avaient 3,5 fois plus de risques que la population générale de développer des troubles dégénératifs du cerveau.
*Ces résultats ne s'étendent pas aux femmes et aux joueurs amateurs ou juniors.
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