Tour de France : la caravane s’amuse

Publié le 17 juillet 2014 à 10h19
Tour de France : la caravane s’amuse

CYCLISME — Difficile d’imaginer un Tour de France sans caravane. Alors qu'une dizaine de millions de spectateurs attendent les coureurs pour les voir passer à toute vitesse, les chars des marques offrent un défilé de près d’une heure le long des routes du Tour. "Metronews" s’est plongé dans ce monde complètement à part.

Rendez-vous au parking caravane
Mercredi matin à Besançon, premier jour de grand soleil sur les routes du Tour. Les hôtesses se beurrent de crème solaire tandis que leur pilote respectif vérifie que la mécanique est bien huilée. "On fait ça tous les matins, raconte, écrou en main, Thibaut, chauffeur d’une légendaire 2 CV Cochonou. La caravane part deux heures avant les coureurs. Nous, on prévoit 1h 30 au village départ pour tout contrôler, tout nettoyer (jusqu’aux garde-boue, armé d’un spray et d’une lingette, ndlr). Ce matin, on a eu un peu de route depuis l’hôtel donc je me suis levé à 6 h 45." Les hôtesses enfilent toutes un harnais de sécurité qui n’enlève rien à leur charme. C’est parti pour 187,5 kilomètres, direction Oyonnax.

En voiture, côté volant
Lunettes de soleil de rigueur posées sur le nez, Johann, en vieux briscard, n’a même pas à chercher sa position dans le siège. "Mon record, c’est 9 300 kilomètres en une seule édition, en 2009", annonce fièrement celui qui, pour son sixième Tour, officie comme pilote pour Skoda. L’ambiance est déjà gaie dans les rues bisontines, mais lui reste concentré. "On a eu un speech d’ASO (organisateur de l’épreuve, ndlr) mardi en guise de mise en garde. Histoire de nous rappeler qu'il faut être vigilant après la journée de repos."

Quelques hectomètres plus loin, les pilotes de Cochonou s’amusent à faire pencher leur "2 Deuch" dans les premiers lacets du parcours. "Elles avancent, hein ?, gouaille Stéphane Domecq, à l’origine de l’arrivée de ces voitures sur le Tour, il y a seize ans. Au début, tout le monde nous a pris pour des fous. Mais elles sont toujours arrivées à Paris !" La vitesse dépasse rarement les 40 km/h, avec pour consigne de raser au maximum les trottoirs. "Sinon les gens ont tendance à s’avancer et ça réduit la chaussée pour les coureurs", justifie Johann.

Les hôtesses, plus acclamées que les cyclistes
Le long des routes, c’est le clip de Happy de Pharrell Williams en non-stop. Appareils dentaires flashés par le soleil, les jeunes filles se déhanchent au côté des hommes à trois jambes, calés à l’entrée de leur maison de retraite pour l’occasion, pour lesquels l’expression "comme en 40" est à peine exagérée. "Cochonouuuuu", crient les amateurs de saucisson quand, en face, un bob Skoda fait l’objet d’une guerre entre deux ados. Avec 26 000 chapeaux par jour pour la marque automobile (+ 3 000 cabas) et 5 000 pour celle de charcuterie (+ 20 000 sachets de saucisson), les hôtesses, debout à l’arrière, ne manquent pas de travail. Et elles sont plus attendues que la Vierge Marie à Lourdes. "On jette au sol comme un frisbee ou plus loin derrière quand il y a du monde", explique Nina, "Madame Cochonou" depuis cinq Tours. Les fins de col (où le public est souvent filmé par la télé) et les cœurs de village sont leurs cibles privilégiées.

Douce France…
La majorité des caravaniers revient chaque année pour vivre à nouveau l’aventure. Les étudiants font ça sur leurs vacances. Pour les autres… "Je prends un mois de congés sans solde chaque année", clame Johann, qui "n’imagine pas un été sans Tour". Deux fois champion de France de billard, il a failli s’abstenir de Grande Boucle cette année pour préparer les Mondiaux avec l’équipe de France. Mais le vélo l’a rattrapé. "Ça, on ne s’en lasse jamais, reprend-il en montrant le public. Du matin au soir, tous les jours, les gens ont la banane. On traverse une période pas facile en ce moment, alors voir les bébés, les grands-pères, nous fêter comme ça, c’est magnifique." Son regard s’égare sur les forêts jurassiennes. "On voit vraiment des paysages de fou", s’émerveille Nina, l’hôtesse.

Terminus
Les coups de soleil n’ont pu être évités. Il ne reste que cinq kilomètres mais les plus précoces n’ont plus un morceau de saucisson dans la glacière à jeter. Les sept 2CV Cochonou effectuent une chorégraphie en zigzags. Tout le monde poursuit jusqu’au au parking, peu après la ligne d’arrivée, pour enlever le plus gros des décorations et filer à l’hôtel, préparer l’étape du lendemain. "Ça fait des grosses amplitudes", souffle Thibaut, le pilote.

À la fin, le grand vide
Il reste dix jours de Tour avant le grand vide. "À la fin, on chiale tous en se disant au revoir, jure Nina. Ça nous fait un petit pincement au cœur. La caravane, c’est comme une petite famille, il y a un esprit. Et seul, les premiers jours, on n’est pas bien." "Une année, j’ai repris le travail dans la foulée, c’était affreux, sourit Johann, de Skoda. Franchement, il me faut quatre à cinq jours pour m’en remettre, physiquement mais surtout psychologiquement." La mini-déprime passée, il retrouvera ses fonctions au comité olympique du conseil général de Haute-Normandie, comme Thibaut ses études. Mais rendez-vous est déjà pris pour juillet 2015.
 


La rédaction de TF1info

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