Mais pourquoi les Bleus galèrent-ils toujours en qualifications pour la Coupe du monde ?

Publié le 5 octobre 2017 à 12h32, mis à jour le 5 octobre 2017 à 15h38
Mais pourquoi les Bleus galèrent-ils toujours en qualifications pour la Coupe du monde ?

FRISSONS BLEUS - L'équipe de France a pris la fâcheuse habitude de jouer à se faire peur jusqu'aux ultimes minutes des qualifications pour la Coupe du monde. Depuis 1986, les Bleus, tétanisés pour certains, suffisants pour d'autres, n'ont terminé que deux fois en tête de leur groupe. Ce mal profond a impacté plusieurs générations.

Tout sauf un long fleuve tranquille. Pour les Bleus, les campagnes de qualification à un Euro ou à une Coupe du monde ont souvent des allures de chemin de croix. Cette campagne pour le Mondial 2018 en Russie n'échappe pas à la règle : alors que l'équipe de France s'apprête à disputer ses deux derniers matches éliminatoires, en Bulgarie samedi puis contre la Biélorussie trois jours plus tard au Stade de France, la bande à Deschamps n'est pas encore assurée de rallier la Russie en juin prochain. Tenus en échec par le Luxembourg (0-0) le mois dernier, les vice-champions d'Europe ne comptent en effet qu'un point d'avance sur la Suède. 

Ils savent que le moindre faux pas pourrait compromettre leurs chances de jouer le Mondial, d'autant plus que seule la première place de leur poule est qualificative directement. "Cette fois-ci, nous en sommes là en raison d'un esprit collectif français stupide. Après la défaite en Suède (2-1), on s'est dit 'bon, ce n'est pas grave. Derrière, on a deux matches chez nous, on gagne contre le Luxembourg et ce sera presque fait'", explique Guy Roux à LCI. "Mais voilà quand on débute dans un match comme si on l'avait gagné, sans même l'avoir joué, souvent on le perd".

France-Bulgarie 1993, le cauchemar sans fin

Et avec la France, c'est comme ça depuis plus de 30 ans. Depuis 1986, elle n'a en effet fini que deux fois en tête de son groupe de qualifications pour la Coupe du monde. Elle a ainsi connu de multiples campagnes traumatisantes, qui se sont parfois conclues en eau de boudin. Lorsqu'on y pense, un souvenir nous vient tout de suite en tête : le 17 novembre 1993. Ce soir-là, les Bleus de Gérard Houllier n'ont besoin que d'un nul pour aller aux États-Unis. Un ballon perdu par Ginola au poteau de corner bulgare et trois passes plus tard, Emil Kostadinov crucifiait Bernard Lama et toute l'équipe de France... alors que le score était de 1-1 à la 90e minute.

PASCAL GUYOT / AFP

Pour l'emblématique entraîneur de l'AJ Auxerre, ce résultat témoigne d'une "suffisance populaire". "En 1993, il nous fallait un point en deux rencontres. Lors du premier match perdu contre Isräel (ndlr : 2-3, le 13 octobre à Paris, et après avoir mené 2-1 à dix minutes de la fin...), on n'a pas pensé que si on les jouait, on pourrait perdre", nous raconte celui qui aujourd'hui exerce le rôle de consultant pour la télévision. "Ce soir-là, je couchais dans un hôtel, pas loin du lieu retenu par les Français pour faire la java en cas qualification. Ça ne s'est finalement pas fait. Et croyez-moi ou non, le mois suivant, cela ne leur avait pas servi de leçon et ils ont remis ça. Je me souviens qu'ils sont même allés jusqu'à jouer "L'Amérique" avant le match contre la Bulgarie. Voillà une illustration parfaite de la stupidité française", fustige-t-il. 

Dans la même situation qu'en 1993
Guy ROUX

Pourtant, selon lui, les joueurs présents sur la pelouse ce soir-là n'avaient pas grand-chose à se reprocher. "L'équipe de France s'est bien battue. Il n'y a pas eu de négligence dans la combativité, ajoute-t-il. Le dernier coup franc est du côté de Gérard Houllier. Je veux bien qu'il y ait du bruit dans le Parc des Princes mais il doit hurler à ses gars : 'Dernière minute ! Gardez la balle !'. Il n'y a pas si longtemps que ça, j'ai regardé la rediffusion de France-Bulgarie et franchement je n'ai pas eu l'impression que c'est ce qu'il faisait. Lui et son staff étaient tous assis sur le banc. Moi, j'aurai été debout, moralement au pied du ballon, à crier."

À l'heure de se déplacer à Sofia, le traumatisme est encore présent dans certaines têtes. Sans doute parce que le scénario ressemble étrangement à celui qui s'est joué il y a 24 ans. "On est au bord du gouffre, un peu dans la même situation qu'en 93. Sauf que là, on a un match sur les deux à l'extérieur au lieu de l'avoir chez nous et qu'un seul point ne suffira pas", nous prévient Guy Roux. Mais allons-y avec l'esprit positif et la tête haute. On a une chance à saisir." 

Les barrages, la peur du vide

S'il est improbable que cela se reproduise, quoiqu'en football rien n'est jamais écrit à l'avance, les Bleus ne sont pas pour autant sortis d'affaire. Rappelons d'ailleurs que lors de ses deux dernières campagnes de qualification pour le Mondial, la France est passée à chaque fois par la case "barrages". Favoris de leur poule, les hommes de Domenech avaient craqué d'entrée avec une défaite inaugurale face à l'Autriche (3-1). Ce départ loupé les avait finalement contraints à se heurter à l'Irlande dans une double confrontation à couteaux tirés pour entrevoir le Mondial 2010. La victoire en poche à Dublin (1-0) à l'aller, elle avait déjoué au Stade de France, ne devant son salut qu'à une main polémique de Thierry Henry (1-1, après prolongation).

PETER MUHLY / AFP

Quatre ans plus tard, en novembre 2013, les frissons ont de nouveau pris les Bleus. Placée dans le groupe de l'Espagne, championne du monde en titre, la France s'était emparée à la sueur de son front de la deuxième place, la reversant directement en barrages. Tout près du précipice après le match aller (2-0) en Ukraine, les hommes de "DD" s'étaient remis à l'endroit (3-0) grâce à un retournement de situation aussi improbable que spectaculaire. Et avaient prouvé de fait qu'ils étaient capables de soulever des montagnes, ensemble, lorsqu'ils étaient mis dos au mur. 

AFP

Si en 2009 et 2013, elle s'en est donc plutôt bien sortie, voir l'équipe de France finir deuxième de sa poule et passer par les barrages n'a évidemment rien de souhaitable. Mais grâce à ses 17 points engrangés à deux journées de la fin, cela ne devrait pas être éliminatoire. Les scénarii de l'Irlande et de l'Ukraine retentiraient alors dans les têtes tricolores, avec l'espoir que cette double confrontation à mort subite ait pour issue la qualification pour la grande messe du foot mondial.


Yohan ROBLIN

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