Qui est Pierre de Villiers, le chef d'état-major des armées dont la démission a été acceptée par Macron ?

Publié le 19 juillet 2017 à 9h40, mis à jour le 19 juillet 2017 à 11h21
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Source : Sujet JT LCI

DÉSACCORD - Même si au beau milieu de la polémique sur le budget de la défense, le général Pierre de Villiers, avait assisté au côté du président Emmanuel Macron au défilé du 14 juillet, le chef d'état-major des armées n'a pas attendu son entretien avec le président prévu vendredi pour annoncer sa démission ce mercredi. Une décision qui correspond bien au caractère bien trempé de ce militaire, qui durant sa carrière n'a jamais hésité à prendre position.

Nombreux sont ceux qui pensaient cette issue inévitable. Malgré les polémiques sur le budget de la défenses, le chef d'état-major des armées, le général Pierre de Villiers, avait assisté vendredi 14 juillet au côté du président Emmanuel Macron au défilé. Et si respectant le protocole, le militaire avait descendu les Champs-Elysées en véhicule d'assitance léger avec le Chef de l'Etat à ses côtés sans que rien ne transparaisse de la polémique pourtant rare, ce mercredi, il a décidé de couper l'herbe sous le pied du président en présentant sa démission deux jours avant leur rencontre programmée. 

Descente des Champs-Elysées du président Emmanuel MacronSource : Sujet JT LCI
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La brouille entre les deux hommes veille, a commencé il y a quelques jours, lorsque le général De Villiers, devant les députés membres de la commission de la Défense, avait fait part de sa colère face au plan d'économie imposé par le gouvernement. Le 13 juillet, Emmanuel Macron avait donc ouvertement recadré son chef d'état-major des armées. "Je considère pour ma part qu'il n'est pas digne d'étaler des débats sur la place publique. J'ai pris des engagements, je suis votre chef. Les engagements que je prends devant les concitoyens, devant les armées, je sais les tenir et je n'ai à cet égard besoin de nulle pression, de nul commentaire", avait lancé le président à l'occasion d'une réception au ministère des Armées.  

"Retoqué par Emmanuel Macron", "Exécuté en public", les mots ont été forts pour qualifier la séquence.   Le général de Villiers peut-il rester en fonction ? "Bien entendu. Vous savez, un message, quand il est exprimé par un chef, est formulé de façon forte et claire et il est reçu", a répondu le Premier ministre sur BFMTV, après le défilé militaire du 14 juillet sur les Champs-Elysées. "Je comprends tous les débats, toutes les interrogations, toutes les discussions, mais s'agissant des armées, et s'agissant du chef des armées, quand une consigne est donnée, elle est tenue", a également déclaré Edouard Philippe.

Qui est le général Pierre de Villiers? LCI vous propose un retour sur le parcours de ce grand homme, devenu chez d'état major des Armées. 

Entré à Saint-Cyr en 1975

Né le 26 juillet 1956 à Boulogne (Vendée), Pierre, François, Marie de Villiers a été admis  à l’Ecole Spéciale Militaire de Saint Cyr en 1975, il choisit à l’issue de sa scolarité de servir dans l’Arme Blindée Cavalerie et rejoint l’école d’application de son arme à Saumur.

Il obtient au fil des années ses grades et passe différents brevets.  

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Parmi les éléments biographiques, le ministère des Armées rappelle notamment qu'"en juin 1999, il commande pendant 5 mois le bataillon d’infanterie mécanisée de la Brigade Leclerc, entrée en premier au Kosovo (dans le cadre de la KFOR - Kosovo Force-).

"Adjoint au chef de cabinet militaire du Premier ministre le 1er juillet 2004, il est promu général de brigade le 1er décembre 2005. Il est nommé commandant de la 2ème Brigade blindée et commandant d’armes de la Place d’Orléans le 1er août 2006, inique également sa biographie. Entre décembre 2006 et avril 2007, il commande le Regional Command Capital en Afghanistan, une des cinq zones d’action de l’OTAN dans le cadre de la force internationale d’assistance et de sécurité (FIAS). Il commande 2500 soldats provenant de 15 pays".

Chef d'état-major des Armées depuis 2014...

Le 15 septembre 2008, Pierre de Villiers est nommé chef du cabinet militaire du Premier ministre. Il occupe cette fonction de conseiller du chef du gouvernement en matière de défense jusqu’au 11 mars 2010, date à laquelle il est nommé major général des Armées. Il prend les fonctions de chef d’état-major des Armées le 15 février 2014 (Armée de terre,  Marine nationale, Armée de l'air, Gendarmerie nationale).

Après les attentats de 2015, il a été chargé des attaques contre l'Etat islamique et a coordonné les differentes opérations extérieures  notamment Barkhane au Sahel, Sangaris en République centrafricaine et Chammal en Syrie et en Irak. Il s'occupe également de l'opération Sentinelle. 

"Le général Pierre de Villiers est grand officier de l’Ordre de la Légion d’Honneur et officier de l’Ordre National du Mérite. Il est titulaire de la croix de la Valeur Militaire avec une citation" ajoute le ministère. 

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Et... joueur amateur, passionné de foot

Quatrième enfant d’une fratrie de cinq (une sœur aînée et trois frères dont Philippe de Villiers),  le général s'est marié à l'âge de 31 ans, et est père de six enfants (Cinq filles et un garçon). Il est également passionné par le football. "Il a pratiqué ce sport dans toutes ses affectations précédentes", peut-on lire dans sa biographie. 

"Frère de Philippe de Villiers, Pierre a souvent été jugé sur son nom, 'en mal ou en bien', d'après son portrait dans Libération en 2014. Sans être favorisé ou freiné dans sa carrière pour délit de patronyme. 'C’est l’honneur de la République', clame-t-il. Ce catholique pratiquant, 'laïc et républicain', se dit ouvert et curieux des autres".  En tant que chef d'Etat Major des Armées, il dispose d'une page Facebook

"Un type agréable, à l'écoute"

Dans le même portrait de Libé, Pierre de Villiers déclarait :"Un bon chef, c’est celui qui s’intéresse aux autres et comprend ses subordonnés. Le dialogue précède l’efficacité. On est bien payé en retour : en opération, un regard du chef suffit parfois pour se faire comprendre."

 "C’est un type agréable, à l’écoute et qui sait se faire aimer de ses hommes, décryptait dans le quotidien un bon connaisseur de l’institution, qui connaît De Villiers personnellement. Mais il a un côté propre sur lui, et je ne l’ai jamais entendu élever la voix. Saura-t-il, demain, fendre l’armure si l’avenir de l’armée est en danger ?"

Oui précisément. Dans une tribune publiée dans Les Echos le 20 décembre 2016 et intitulée "Le prix de la paix, c’est l’effort de guerre, le général de Villiers prenait publiquement la parole pour tirer la sonnette d'alarme.  Le haut responsable de l'armée française réclamait notamment 4 milliard d'euros pour remplacer des "équipements anciens", renforcer "les engagements extérieurs de la France". 

"Je ne vais pas me faire baiser comme cela"

Le 12 juillet dernier,  le général a prouvé une fois de plus qu'il n'aimait pas que l'on touche à ses hommes. Auditionné devant la commission de la Défense à l'Assemblée, le général a tapé du poing sur la table, expliquant que l'armée avait déjà "tout donné" et jugé la situation "pas tenable".

"Je ne vais pas me faire baiser comme cela", a ajouté le général de Villiers, selon plusieurs participants. Le chef d'état-major des armées est réputé pour son franc-parler et sa détermination à défendre le budget des armées face à Bercy. Devant les députés, il a expliqué que, faute de moyens, l'armée française devait régulièrement annuler des opérations après parfois des mois de recherche sur le terrain.

"A la guerre toute insuffisance se paye cash"

"J'ai entendu et vu un homme très en colère (..) Il était remonté contre les coupes budgétaires et considère qu'elles ne permettront pas à nos armées de fonctionner comme il se doit", a décrit le député socialiste Luc Carvounas.

"C'est tout à fait exceptionnel qu'un chef d'état-major dise des choses pareilles", a observé le président de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde, précisant que le général avait été applaudi après son intervention, "sur tous les bancs".

Le général de Villiers a dit "être responsable de la défense nationale et ne pas vouloir assumer la préparation d'une défaite" et "a été extrêmement clair sur les lacunes de capacité d'action des armées françaises, après dix ans de disette et une multiplication des missions, intérieures et extérieures", a-t-il rapporté. "Déficit en capacité de force de projection des matériels, avec par exemple 60% de véhicules non blindés, déficit d'entraînement des pilotes...", a énuméré Jean-Christophe  Lagarde.

PIerre de Villiers a souligné qu'"à la guerre toute insuffisance se paye cash", laissant entendre que derrière ce sont des vies en jeu, selon un autre participant. Le général a appelé à un effort sensible et rapide au plan budgétaire, disant en substance que l'objectif, fixé par Emmanuel Macron, d'atteindre "2% du PIB en 2025, c'est sympa, mais qu'il faut agir dès 2017 et 2018", a rapporté le même.

En 2014, Pierre de Villiers avait mis sa démission dans la balance, avec les chefs d'état-major des trois armées (Air, Terre et Mer), devant la perspective de coupes budgétaires. Ministre de la Défense à l'époque, Jean-Yves Le Drian, avait alors pris fait et cause pour ses troupes.  


La rédaction de TF1info

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