Le 20h

VIDÉO - Contournement routier : l'incroyable gâchis d'un chantier à 40 millions d'euros en Dordogne

par V. F Reportage TF1 : Yaël Chambon et Christophe Brousseau
Publié le 29 septembre 2023 à 15h56

Source : JT 20h Semaine

Une cinquantaine de projets de contournement routier sont aujourd'hui contestés, c'est le cas à Beynac, en Dordogne.
Sauf que là, la justice a ordonné sa démolition alors que les travaux avaient déjà commencé.
Des millions d'euros d'argent public ont donc été dépensés pour un projet qui ne verra sans doute jamais le jour.

Le contournement routier de Beynac, un village de 500 habitants classé parmi les plus beaux de France, avec son château médiéval perché sur une falaise dominant la Dordogne, enflamme les esprits locaux depuis trois décennies. À l'arrêt depuis quatre ans, le chantier vient de reprendre. Mais attention, l'objectif n'est pas de terminer la construction de l'ouvrage, mais de... tout démolir. 

C'est beaucoup trop d'argent public de perdu. C'est beaucoup d'énergie de perdue.
Jean-Michel Sautreau, conseiller départemental

Condamné par la cour administrative de Bordeaux à remettre le site en l'état, le département payait, depuis six mois, une amende de 3 000 euros par jour, soit, au total, près de 500.000 euros. "La justice a tranché, il a fallu payer et nous avons payé et nous engageons les travaux comme c'est demandé", explique Jean-Michel Sautreau, conseiller départemental. La première étape est donc de démolir la nouvelle route pour remettre en service l'ancienne, deux voies espacées d'à peine une vingtaine de mètres. "Ce tracé n'existera plus, tout simplement, et reprendra le tracé initial. C'est beaucoup trop d'argent public de perdu. C'est beaucoup d'énergie de perdue. Bien évidemment", regrette-t-il. 

Il faudra ensuite démonter le cœur de l'ouvrage : les gigantesques piles en béton du pont restées inachevées que la future déviation devait enjamber. Construites dans le lit de la rivière, elles sont toujours là. Toutefois, le département espère encore pouvoir les sauver avec un nouveau projet. "Il n'est pas question d'arrêter, bien au contraire. On nous accuse de dilapider l'argent public, mais arrêter, là, ce serait vraiment un puits sans fond", insiste Jean-Michel Sautreau.

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Une catastrophe écologique

Un gâchis qui a déjà coûté 26 millions d'euros à la Dordogne. Avec la démolition, l'addition pourrait dépasser les 40 millions d'euros. Ce projet lancé il y a plus de 30 ans devait permettre aux poids lourds de contourner le village médiéval de Beynac et sa route, jugée trop étroite, via deux ponts au-dessus de la Dordogne. Mais pour ses opposants, cette nouvelle route est une catastrophe écologique et défigurerait cette vallée du Périgord noir aux charmes encore préservés. 

"Vous allez avoir une tranche noire complète avec des camions. On a le droit de défendre une région aussi extraordinaire qui soit contre notamment une espèce d'envahissement routier qui brise complètement une vue entre Fayrac, Beynac et Castelnaud. C'est absolument ridicule", assure Philippe d'Eaubonne, président de l'Association de sauvegarde de la vallée de la Dordogne. 

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Cette guerre a fini par lasser la propriétaire du château des Milandes. La nouvelle route qui va être détruite mène à ce site du XVᵉ siècle. Rester neutre jusque-là, la châtelaine dénonce un gâchis. "Écologiquement et économiquement, c'est une hérésie en fait. Oui, on marche sur la tête à vouloir casser une route qui était neuve, qui fait à peu près 500 mètres, qui est vraiment avec toute la signalisation possible. Après, il faut que les gens puissent venir et repartir aussi correctement", affirme Angélique de Labarre. Une infrastructure nécessaire, selon elle, car le nombre de visiteurs a doublé ces dernières années aux Milandes. 

Éviter une circulation trop dense à Beynac, c'était également le but de cette déviation à l'origine. Un projet qui continue de diviser les habitants du village. "Je pense qu'il faut qu'ils trouvent un point d'entente pour pouvoir la finir. Je ne vois pas pourquoi on ne peut pas arriver à s'entendre à ce niveau-là", admet un restaurateur. "On a envie que ça s'arrête", renchérit un jeune homme. Entre développement touristique et préservation d'une vallée au charme d'antan, le débat risque de durer encore des années et le bilan financier, lui, est loin d'être clos.  


V. F Reportage TF1 : Yaël Chambon et Christophe Brousseau

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