TÉMOIGNAGE - Alors que l'on célèbre ce samedi 1er février les 20 ans de l'entrée en vigueur des 35 heures, LCI explore les expériences innovantes en matière de temps de travail. Sébastien Antonio est depuis 24 ans salarié d'Yprema, une société de recyclage dont il est chef de site à Reims. En 1997, l'entreprise a mis en place les 35 heures, mais sur une semaine de 4 jours. Il nous raconte ce que cela a changé dans sa vie professionnelle, mais aussi personnelle.
Il se rappelle encore les réactions quand la direction de sa société a annoncé que désormais, ils allaient travailler quatre jours par semaine. Pas convaincus, les salariés. Vraiment sceptiques. "Il ne faut pas oublier qu’on est en France, et que dès qu’’il y a du changement, on a peur", rigole Sébastien Antonio.
Nous sommes en 1997. Un peu avant l’époque du passage aux 35 heures. Sébastien Antonio, aujourd’hui chef de site à Reims, travaille déjà chez Yprema, une société experte en recyclage de matériaux de déconstruction du BTP basée dans le Val-de-Marne. La loi Robien sur l’aménagement du temps de travail vient d’être votée, le 11 juin 1996. Elle permet aux entreprises de réduire le temps de travail des salariés en contrepartie d’un allègement de cotisations pendant 7 ans, à la condition qu’ils embauchent au moins 10% de salariés en CDI. Le PDG d’Yprema, Claude Prigent, y voit son intérêt. Il veut faire passer les salariés aux 35 heures, réparties sur 4 jours par semaine. Le raisonnement du patron est global : il a de gros investissements de matériel et doit amortir au mieux les coûts financiers. Il a donc tout intérêt à ce que ses machines tournent le plus possible.
De nouveaux postes créés, des personnes embauchées
Mais quand on leur présente le projet, donc, les salariés toussent. "L’activité était très porteuse, tous les sites avaient des cadences de production très fortes, on devait souvent travailler le samedi ou le soir. Alors quand le directeur nous a dit qu'on allait passer de 39 à 35 heures, on n'y croyait pas : comment allait-on obtenir le même rendement ?"
Mais le patron est allé au bout de son idée. Planning, roulements, tout a été remis à plat. "35 heures sur 4 jours, cela fait des journées plus longues d’environ une heure et demi", explique Sébastien. "Pour que cela fonctionne, on a créé un poste polyvalent : une personne supplémentaire a été embauchée sur chaque site, qui remplace la personne absente", poursuit-il. "Du coup, nos installations tournaient aussi plus longtemps. Et si vous faites le compte, cela fait au total un mois de production entière qui est gagné chaque année. Donc l’entreprise s'y retrouve !" ,Évidemment, ce fonctionnement ne souffre pas d’approximation. "Un des inconvénients, c’est qu’en cas d’absence ou d’arrêt maladie, le grain de sable dans la mécanique est plus prononcé. La seule solution, c’est de former les gens à la polyvalence."
"Tout le monde se battait pour avoir le vendredi ou lundi"
Sébastien Antonio, chef de site à Reims
"Une heure et demi de plus par jour, soit environ 9 heures de travail au total, ce n’est pas énorme, c’est encaissable, mais ça peut fatiguer, d’autant plus si on est sur un poste un peu exposé, comme manœuvre", reconnaît Sébastien. "Mais un jour de repos en plus par semaine, c’est quand même un confort !" Ce jour chômé en plus semble en effet lever tous les doutes. Sébastien, lui, s’est positionné sur le mercredi. "Il a fallu s’organiser par site", explique-t-il. "Je suis le seul à avoir sauté sur le milieu de la semaine, alors que tout le monde se battait pour avoir le vendredi ou lundi, afin d'avoir un week-end de trois jours. Moi, cela me permettait de m’occuper de mes enfants. Et le mercredi, cela coupe la semaine en deux."
Et ce jour en plus de liberté change toute la vie personnelle. "On peut aller faire les courses, s’occuper des papiers reçus, aller à la banque... Les week-ends deviennent ainsi de vrais week-ends", se réjouit Sébastien. D'autant que, ses filles ayant grandi, elles n’ont plus besoin de lui le mercredi. "J’ai revu le programme : je vais à la pêche, au cinéma… Je n’ai plus besoin de cavaler !"
Je suis étonné qu’il n’y ait pas plus de grosses entreprises qui aient sauté sur l’opportunité
Sébastien Antonio, chef de site
Aujourd’hui, le, dispositif a fait ses preuves. "Si on proposait aux salariés de revenir au travail sur cinq jours, je ne sais pas s’il y aurait des candidats !", glisse Sébastien : "Tout le monde a à y gagner." Il le sait ce modèle n’est pas forcément applicable partout. "Nous avons pu le faire parce que nous étions une PME d’une cinquantaine de salariés, ce qui permettait de tourner. Une boîte plus petite n'y arriverait sans doute pas", estime-t-il. "En revanche, je suis étonné qu’il n’y ait pas plus de grosses entreprises qui aient sauté sur l’opportunité, quand je vois à quel point cela a été gagnant-gagnant pour les deux parties. Mais quand elles veulent produire plus, elles prennent des intérimaires et tournent comme des malades. Et quand elles veulent produire moins, elles licencient... C’est dommage d’oublier l’humain !"
Sur le
même thème
- Semaine de 4 jours : la tentation des patronsPublié le 19 février 2022 à 20h20
- Ces entreprises françaises qui testent la semaine de quatre joursPublié le 13 janvier 2022 à 16h10
- "Le confinement a été plutôt bénéfique pour moi" : ils ont saisi l'occasion pour changer de métierPublié le 13 août 2020 à 13h14
- Ce patron un peu fou qui parie sur la semaine de 32 heures sur 4 joursPublié le 6 juillet 2020 à 18h24
- Ils ne veulent pas revenir au travail, ces salariés nous expliquent pourquoiPublié le 28 mai 2020 à 8h00
- Paroles de PME #1 - "On avait déjà commencé à lister les gens qu’on allait devoir licencier"Publié le 26 mars 2020 à 18h41
- VIDÉO - Plongée dans ces entreprises françaises qui offrent des congés illimités à leurs salariésPublié le 5 février 2020 à 17h32
- "On n’a pas perdu en productivité !" : le plaidoyer d'un patron pour la semaine de 4 joursPublié le 1 février 2020 à 8h00
- "Dans la durée, on a besoin de se voir" : 7 enseignements pour les salariés et entreprises un mois après le début de la grèvePublié le 6 janvier 2020 à 13h30
- "Être mis dehors au bout de 30 ans, c'est dur à avaler" - Trois "seniors" nous racontent leur fin de carrièrePublié le 10 décembre 2019 à 9h02
- Seniors, ils racontent leur fin de carrière (3/3) : "J'ai toujours été très investie, me faire virer a cassé la dynamique"Publié le 10 décembre 2019 à 9h00
- Seniors, ils racontent leur fin de carrière (2/3) : "On vous dessaisit de vos dossiers, de manière brutale"Publié le 10 décembre 2019 à 8h30
Tout
TF1 Info
- 3
- 4Bordeaux : un homme placé en garde à vue pour avoir volé du matériel destiné aux incendies de LandirasPublié le 15 août 2022 à 17h03
- 5Orages violents : 7 départements en alerte orange, risques d'inondationsPublié hier à 19h03
- 8
- 9Quelle quantité de pluie faudrait-il pour reconstituer le niveau des cours d'eau et des nappes phréatiques ?Publié le 15 août 2022 à 22h28
- 10Distribution de pastilles d'iode dans les Vosges : "Une mise à jour classique du plan de distribution"Publié le 15 août 2022 à 11h47
- 1Une nouvelle vague de Covid-19 est "quasi-certaine" à l'automnePublié aujourd'hui à 9h06
- 2Météo : après un été hors norme, à quoi s’attendre pour la rentrée ?Publié aujourd'hui à 9h04
- 3Rodéo urbain : une nouvelle victime à MarseillePublié aujourd'hui à 9h00
- 5
- 6Elon Musk affirme vouloir acheter Manchester United... avant d'avouer qu'il s'agissait d'une blaguePublié aujourd'hui à 7h56
- 7
- 8EN DIRECT - Emmanuel Macron et Narendra Modi veulent "travailler ensemble" sur la guerre en UkrainePublié aujourd'hui à 7h30
- 9Ennemie jurée de Trump, la républicaine Liz Cheney éjectée de son siège au CongrèsPublié aujourd'hui à 6h53
- 1Emploi : ils quittent tout pour ouvrir une boulangeriePublié le 12 octobre 2021 à 20h22
- 2Qui peut vendre sur les marchés, et à quelles conditions ?Publié le 18 juin 2020 à 14h52
- 3Jobs d’été : désormais, on recrute aussi via les réseaux sociauxPublié le 9 juin 2021 à 17h32
- 4Cordialement, bien à vous... les 10 formules pour bien finir un mail proPublié le 29 novembre 2019 à 15h35
- 5Jobs d'été : y a-t-il une rémunération minimum ?Publié le 8 juillet 2022 à 18h30
- 6Vacances : on a suivi la vie à 100 à l'heure d'un animateur de campingPublié le 9 août 2022 à 12h04
- 760 heures par semaine, congés, repos compensateur… Le Code du travail flexibilisé face au coronavirusPublié le 28 mars 2020 à 17h24
- 8Sobriété énergétique : les entreprises artisanales sont déjà en pointePublié le 5 août 2022 à 14h59
- 9Made in France : Opinel, fleuron de la coutellerie françaisePublié le 6 octobre 2017 à 22h39
- 10Les courses camarguaises annulées, le secteur à la peinePublié le 28 juillet 2020 à 13h18
- Police, justice et faits diversAccusé de plusieurs viols en Angleterre, le footballeur Benjamin Mendy face à la justice
- InternationalLe domicile de Donald Trump perquisitionné, des documents "top secret" saisis
- InternationalL'écrivain Salman Rushdie poignardé à New York
- EnvironnementOpération sauvetage pour un béluga coincé dans la Seine
- Police, justice et faits diversRodéos urbains