À l'ère du numérique et malgré les progrès, le taux de chômage des personnes handicapées reste deux fois plus élevé que celui de la population générale.Alors que débute ce lundi la 27ᵉ édition de la semaine européenne pour l'emploi des personnes en situation de handicap, Karine Reverte, directrice générale de LADAPT, répond à TF1info.Entretien.
C'est une tendance à la baisse qui mérite d'être nuancée. En France, le taux de chômage des personnes handicapées (tous handicaps confondus) est estimé à 12% par le ministère du Travail - en nette diminution par rapport à 2015 (17,3%) -, mais il demeure toujours plus élevé que la moyenne nationale (7,4%). Les Français en situation de handicap ont donc "deux fois plus de risques d'être au chômage", déplorent les associations, alors que débute ce lundi 20 novembre la 27ᵉ édition de la semaine européenne pour l'emploi des personnes en situation de handicap (SEEPH).
À l'ère du numérique, la technologie peut-elle réduire cet écart ? L'intelligence artificielle représente-t-elle un espoir pour les quelque 12 millions de Français qui souffrent d'un handicap ? Karine Reverte, directrice générale de LADAPT, l'association à l'origine de la SEEPH, répond à TF1info.
Le chômage baisse pour les personnes handicapées : à quel point la technologie permet-elle de réduire l'écart entre handicapés et valides ?
Le taux de chômage pour les personnes handicapées est en effet au plus bas depuis huit ans, mais il est toujours le double de l'ensemble de la population. La situation s'améliore, mais il demeure des difficultés. En ce sens, le numérique, omniprésent dans nos vies quotidiennes, est un formidable accélérateur d'inclusion.
Aujourd'hui, les lois d'accessibilité ne sont pas toutes respectées
Karine Reverte
Quelles avancées permet-il ?
Il existe de nombreux exemples : une personne qui a perdu l'usage de ses mains peut aujourd'hui allumer un ordinateur avec l'assistance vocale, du texte peut se convertir en son pour une personne aveugle, une personne sourde peut passer un coup de téléphone grâce à des traducteurs en langue des signes, le télétravail donne l'occasion aux personnes rencontrant des difficultés de déplacement de travailler à distance... Tout cela permet aux personnes handicapées de se rapprocher de l'emploi, même s'il existe encore beaucoup d'obstacles.
Lesquels ?
Aujourd'hui, les lois d'accessibilité ne sont pas toutes respectées. Depuis 2005, tous les sites des administrations publiques ont une obligation d'accessibilité. Dix-huit ans plus tard, ce n'est toujours pas le cas partout. Il y a aussi un frein de certains employeurs, qui pensent qu'une personne handicapée ne sera pas forcément à même d'occuper des postes techniques. Dès lors, il y aura toujours besoin de sensibilisation sur le handicap en entreprise.
L'intelligence artificielle propulse les usages numériques aux yeux du grand public
Karine Reverte
Au niveau du numérique, la France dispose-t-elle de tous les outils pour aider les personnes en situation de handicap ?
Oui, je pense. Les lois sont là, notamment celle de 2016 "pour une République numérique". Il y a également une directive européenne qui impose cette accessibilité numérique. La difficulté, c'est que ce n'est pas forcément appliqué. La simple obligation d'emploi des personnes handicapées dans les entreprises (6%) n'est pas respectée - nous en sommes à 3,5% dans les entreprises privées -, alors que la loi date de 1987. Tout est là, mais nous avons besoin d'une impulsion politique et que la société s'empare de ces sujets, qui concernent tout de même 12 millions de personnes, en plus des aidants et des familles.
Quid de l'intelligence artificielle ? Son développement peut-il aussi favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées ?
C'est un espoir, cela propulse certains usages numériques aux yeux du grand public. Des applications comme Siri ou Google Assistant sont extraordinaires pour une personne handicapée. Cela améliore la vie, quotidienne comme professionnelle. Avant, développer une application pour un public sourd n'intéressait pas forcément les entreprises. Mais de nombreuses innovations sont devenues grand public, ce qui crée une multiplicité de nouveautés qui aident les personnes en situation de handicap. Par exemple, les montres connectées permettent aux personnes ayant un handicap cognitif, comme la perte de mémoire, de leur rappeler les tâches à effectuer. C'est primordial pour l'autonomie du salarié en entreprise.