INTERVIEW - Faillites, suppressions d'emplois, annulations de commandes, l'aéronautique subit de plein fouet les conséquences économiques de la crise du coronavirus. Pascal Perri, économiste et animateur sur LCI, revient sur cette situation.
Airbus a dévoilé un plan social pour "redimensionner son activité dans l’aviation commerciale". Près de 15000 postes dans le monde vont notamment être supprimés, dont 5000 en France. L'aéronautique dans son ensemble est particulièrement touchée par la pandémie de coronavirus et de nombreux acteurs du secteur ont déjà pris des décisions similaires pour faire face aux difficultés économique.
Pascal Perri, l'économiste et animateur sur LCI de Perriscope, décrypte sur les raisons de cette situation pour l'aéronautique.
LCI : Les suppressions par Airbus de 15.000 emplois, dont 5000 en France, sont-elles vraiment nécessaires ?
Pascal Perri : Au regard de la situation, il est difficile de prétendre le contraire. La crise du coronavirus a entraîné des pertes considérables pour le secteur aéronautique et donc pour Airbus. Des difficultés logistiques sont également apparues. Lorsque l'on regarde le carnet de commandes de la société, il existe de véritables sources d'optimisme pour l'avenir. Il est bien garni pour les années à venir. Toutefois, la firme n'est pas à l'abri de mauvaises surprises : elle peut faire face à des annulations par exemple. Son principal concurrent Boeing est lui aussi déjà largement impacté par cette problématique. Nous n’avons aucune visibilité quant à un possible retour à la normale ou du moins à une situation sanitaire et économique plus stable. Nous avons des indications sur le court terme, mais c'est plus compliqué sur le moyen et long terme.
Dans quelle mesure faut-il s'inquiéter pour l'avenir d'Airbus ?
A titre personnel, je ne suis pas inquiet pour Airbus. Sur le plan économique, il s'agit d'une importante entreprise aux reins très solides. C'est aussi un véritable projet politique, l'un des symboles de la construction économique européenne. Airbus ne sera pas abandonné par les Etats, les enjeux sont bien trop forts. D'ailleurs, je pense qu'il ne faut pas que l'Etat hésite à agir davantage. L’aéronautique est un secteur à intensité capitalistique élevée, il mobilise des fonds considérables pour investir et produire. Pour autant, je pense qu'il n'y a pas d'inquiétudes à se faire pour le cas d'Airbus du moins. Le cas des sous-traitants et de toutes les (plus petites) entreprises liées à Airbus me préoccupe davantage.
Justement, d'autres entreprises pourraient se retrouver en danger...
Airbus est la structure la plus importante du secteur aéronautique. Néanmoins, elle est aussi reliée à une multitudes d'autres entreprises à qui elle sous-traite de nombreuses étapes dans le processus de production (pièces détachées, la carrosserie, etc…). Cet important tissu économique occupe une place considérable dans l'économie du sud-ouest de la France, à commencer par le bassin toulousain et l'Aquitaine. Toutes ces firmes ne sont pas forcément robustes, en tout cas pas suffisamment pour supporter des annulations de leur client principal, Airbus. Par conséquent, on risque beaucoup de casse de ce côté-là. Au final, les suppressions d'emplois dans l'aéronautique ne s'arrêteront vraisemblablement pas à Airbus.
Comment expliquer l'impact particulièrement important de la crise sanitaire sur le secteur de l'aéronautique ?
La pandémie a entraîné une restriction considérable du trafic aérien. Cela créé une variété de dysfonctionnements et problématiques économiques qui, mises bout à bout, explique la situation dans laquelle se trouve l'aéronautique aujourd'hui. En premier lieu, le transport aérien a perdu beaucoup de production. C’est un secteur qui comprend des coûts fixes très élevés. Lorsque le trafic baisse, ces coûts fixes demeurent. De surcroît, les vols longs courriers, principale source de revenu, n'ont, dans une large majorité, pas encore repris. Par voie de conséquence, la situation fragile des transporteurs aérien impacte ensuite les constructeurs d'avions et, donc, le secteur de l'aéronautique dans sa globalité.
Pour survivre à la crise, le secteur de l'aéronautique doit-il se réinventer notamment sur le plan environnemental ?
Non je ne crois pas, outre mesure. En vérité, aujourd'hui les avions sont de moins en moins polluants. Les constructeurs ont fait des avancées considérables. Désormais, la consommation par tête n’excède pas celle d’une voiture (5/6 L aux 100 kms max), et le progrès va continuer. Non, pour l'après-Covid, je pense que tout l'enjeu réside dans un retour à une situation normalisée. Le transport aérien repose sur deux grands piliers : la confiance et la prévisibilité. S'ils ne sont pas réunis, les gens vont avoir tendance à moins utiliser ce mode de transport. En l’occurrence, la pandémie créé un climat d'imprévisibilité extrême, du fait de notre connaissance incomplète du virus, et sape la confiance des voyageurs. Il est donc surtout important de revenir à un contexte apaisé.
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