"Présentéisme maladie" : pourquoi les salariés respectent de moins en moins leurs arrêts de travail

Publié le 28 novembre 2019 à 14h40
"Présentéisme maladie" : pourquoi les salariés respectent de moins en moins leurs arrêts de travail
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ÉTUDE - Une enquête annuelle de Malakoff Médéric Humanis montre que près d'un salarié sur deux (44%) s'est vu prescrire au moins un arrêt de travail au cours des douze derniers mois. Mais les prescriptions médicales sont de moins en moins respectées.

Au travail, même malade ! L’enquête annuelle de Malakoff Médéric Humanis*, publiée ce jeudi, met en lumière un phénomène nouveau : les arrêts médicaux prescrits par les médecins sont de moins en moins respectés par les salariés concernés. D'après les chiffres avancés, ce sont 28% des arrêts maladie prescrits en 2019 qui n'ont pas été respectés. Une hausse de 5 points par rapport à 2018, et de 9 si l'on remonte à 2016 : 11% des arrêts ont été pris mais pas en totalité (les salariés sont revenus travailler avant la fin de l’arrêt), et 17% n’ont tout simplement pas été pris en compte. "Les arrêts de quatre à dix jours sont ceux qui sont le moins pris. Entre six et 15 jours, ils le sont plus mais souvent partiellement", précise l'enquête.

Ce "présentéisme maladie", comme on appelle ce phénomène de salariés travaillant alors qu’ils devraient être arrêtés en raison de leur état de santé physique ou mentale, est très répandu : 65% des salariés déclarent avoir déjà travaillé alors qu’ils étaient souffrants, une tendance plus marquée chez ceux ayant des responsabilités d’encadrement (72%), ou lorsque le salaire n’est pas maintenu pendant les trois premiers jours d’arrêt (69 %).

La volonté de ne pas se laisser aller

Pourquoi renoncent-ils ? Les salariés concernés par le "présentéisme maladie" évoquent en premier lieu le fait "qu'il n’est pas dans leurs habitudes de se laisser aller" (à 39%). Mais cette conscience professionnelle est en net recul depuis 2016 (48% à l'époque). Elle est surtout rattrapée par les considérations financières : 37% des sondés mettent en avant le fait que les journées non travaillées ne sont pas prises en charge par l'entreprise, contre 29% en 2016. Contrairement aux idées reçues, seuils 44% des salariés du privé travaillent en effet dans une structure qui maintient leur salaire durant les trois premiers jours d’arrêt maladie. 

Le bien-fondé de l'arrêt maladie délivré par le médecin ne semble lui pas faire de doute : seules 6% des personnes qui ne prennent pas leur arrêt maladie pensent qu'il n'est pas justifié. En revanche, beaucoup évoquent aussi cette impression d'être indispensables : "impossible de déléguer ses tâches" (motif invoqué à 22%) ou "peur d’être surchargé de travail au retour". Mais d'autres témoignent aussi en creux d'une pression : la peur de perdre son emploi est citée par 15% des sondés,de même que le fait de se sentir "contraint par sa hiérarchie" 13%) et la "peur que cela soit mal vu par les collègues "(12%). 

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Les jeunes très touchés

A noter, les arrêts maladie sont davantage pris dans les grandes entreprises (+ de 250 salariés) : 79% contre 72% pour l’ensemble des arrêts. Le respect de l’arrêt maladie varie également en fonction de sa durée : les arrêts longs sont respectés à 90%, les moyens à 67% et les courts à 75%.  Cependant, près de la moitié des salariés (47%) n’ayant pas respecté leur arrêt de travail disent le regretter a posteriori, un chiffre en hausse de 8 points par rapport à 2016. Par ailleurs, près de deux tiers des salariés (63%) seraient favorables au fait de bénéficier du télétravail au lieu d’avoir un arrêt maladie si leur médecin le jugeait approprié. Un point de vue partagé par 80% des dirigeants. 

Plus globalement, le rapport note que près d'un salarié sur deux (44%) s'est vu prescrire au moins un arrêt de travail au cours des douze derniers mois, un chiffre stable mais "élevé". Phénomène troublant : 49% de ces arrêts concernent les 18-34 ans. "Ce chiffre ne s'explique pas par un moindre engagement", commente Anne-Sophie Godon, membre du cabinet. "Les salariés de cette tranche d'âge ont un nouveau rapport au travail et à la santé, plus pratique ; ils travaillent aisément avec le digital, de chez eux ou en nomadisme, et ont aussi peut-être l'image négative de leurs parents qui ne s'arrêtaient jamais". 

Selon les salariés interrogés, ces arrêts sont liés à des maladies ordinaires dans 36% des cas, à des troubles musculo-squelettiques (TMS) dans 25% et à des troubles psychosociaux ou à un épuisement professionnel (burn out) dans 18% des cas.

En juin 2019, une autre étude de Malakoff-Médéric Humanis révélait en effet que 54% des salariés avaient le sentiment d'être épuisés par leur travail, une hausse de 4 points par rapport à 2018.

> *Enquête réalisée par internet du 14 août au 3 septembre 2019 auprès de 2.000 salariés du secteur privé et 400 dirigeants d'entreprises.


La rédaction de TF1info

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