Le télétravail, "désormais un réflexe" pour s'adapter aux contraintes comme les intempéries

Propos recueillis par Maëlane Loaëc
Publié le 14 décembre 2022 à 19h43, mis à jour le 14 décembre 2022 à 20h33

Source : JT 20h Semaine

La pratique est de plus en plus commune dans les entreprises qui le permettent : de nombreux salariés travaillent à distance pour éviter de se déplacer sous la neige.
Ce recours, qui a explosé depuis le Covid-19, répond en fait à beaucoup d'autres difficultés.
De quoi l'installer durablement dans le monde du travail.

Un appel à rester chez soi. Avant même que les premières difficultés apparaissent dans les transports et sur les routes, la préfecture d'Île-de-France avait demandé dès mardi soir aux quelque 12 millions d'habitants de la région qui le pouvaient de privilégier le télétravail en ce mercredi enneigé sur la moitié nord de la France. Un recours devenu "une sorte de réflexe" et qui a été adopté par plus d'un quart des salariés de façon régulière depuis le Covid-19, explique auprès de TF1info Benoît Serre, vice-président délégué de l’Association Nationale des Directeurs des Ressources Humaines (ANDRH) et lui-même DRH du groupe L'Oréal France.

Le télétravail est-il devenu un incontournable pour les postes le permettant, dès que les déplacements au bureau sont contraignants ? 

C'est en effet désormais une solution alternative dans le fonctionnement du travail, et même une nouvelle norme, une sorte de réflexe, que ce soit face à la neige, mais aussi les grèves, les reprises épidémiques, ou même tout simplement la fatigue. Des médecins commencent ainsi à recommander d'augmenter la part de télétravail pour tel ou tel salarié. Dans le langage commun, cette solution ne choque plus personne, et je pense que c'est une très bonne évolution. Et à l'heure actuelle, le dispositif est satisfaisant : chaque entreprise décide de son propre fonctionnement, et le gouvernement peut lancer des appels ponctuels en fonction des périodes. C'est un modèle d'adaptation flexible.

La part de télétravailleurs réguliers en France est passée de 3% avant la crise sanitaire à 26% environ aujourd'hui
Benoît Serre, vice-président de l'Association Nationale des DRH

En quoi la crise sanitaire a-t-elle bouleversé notre rapport au télétravail ? 

Avant le Covid-19, la pratique était si peu répandue que les entreprises n'étaient pas organisées pour cela et que les employeurs étaient réticents. Il faut dire que la culture en France est davantage présentéiste, alors que le télétravail fonctionne depuis longtemps très bien dans les pays du Nord, comme aux États-Unis. Mais désormais, la part de télétravailleurs réguliers en France est passée de 3% avant la crise sanitaire à 26% environ aujourd'hui, sur les 30 à 35% de salariés qui peuvent travailler à distance. Le système est bien plus rôdé, ils disposent d'ordinateurs portables et maîtrisent Teams et Zoom.

Du côté des employeurs, la plupart se sont adaptés, et les plus sceptiques y sont de toute façon un peu contraints à présent : le télétravail est devenu un critère de recrutement pour les candidats. Par ailleurs, il ne nuit pas tant à la productivité individuelle, quand le nombre de jours est limité à deux par semaine, comme c'est le cas en moyenne dans la plupart des entreprises. En revanche, la productivité collective peut être un peu touchée. Il faut laisser du temps pour que les choses s'installent, c'est encore un nouveau mode de travail. 

La tendance va-t-elle se confirmer dans les années à venir ? 

J'en suis convaincu, même si cela implique des adaptations en termes de management, d'organisation. Pour l'heure, le télétravail reste très centré dans les grandes villes, notamment en Île-de-France, mais il gagne du terrain sur les postes qui s'y prêtent. Et la moitié des métiers seront probablement télétravaillables d'ici cinq ans, d'après une étude de notre association.

Mais il ne faut pas pour autant basculer complètement dans le distanciel : je ne crois pas au modèle du "full remote", les entreprises sans locaux communs, qui n'existent donc plus vraiment. Elles sont présentes dans la tech, entre autres, mais leur part a reculé parce que les salariés ressentaient le besoin de se voir. On s'est ainsi rendu compte ces derniers temps que l'entreprise jouait un rôle particulier de lien social. Attention aussi au risque de recruter partout sauf en France : l'emploi dans notre pays pourrait le payer. Le tout est donc dans l'équilibre.


Propos recueillis par Maëlane Loaëc

Tout
TF1 Info