Lieux d’exception de nos îles tropicales françaises : entre histoire et industrie

"A l'instant où l'esclave décide qu'il ne sera plus esclave, ses chaînes tombent", dit un jour Gandhi. Dans les régions tropicales françaises de Guadeloupe, de Martinique, de la Réunion et de Mayotte, les insulaires restent profondément marqués par les destinées de leurs ainés. L’esclavage, le colonialisme, les migrations ou encore les luttes économiques et sociales demeurent dans les esprits. Le 10 mai 2015, le mémorial ACTe a ouvert ses portes à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. À l’intérieur, les visiteurs se souviennent de la traite des noirs, de leurs migrations forcées, du rôle des marchands ou encore de l’héroïsme de la résistance à l’esclavage, au marronnage et aux différentes formes d’insoumission. En mai 1948, au moment de l’abolition de l’esclavage en France, 250 000 esclaves continuaient à se faire exploiter en Guyane, Martinique, Guadeloupe et à la Réunion. Leurs descendants racontent la dureté des travaux agricoles, les fugues, les sévices, mais aussi beaucoup de traditions musicales.

En Martinique, en particulier, le souvenir de l’esclavage traverse les mémoires. Le mémorial de l’Anse Caffard (Cap110) se trouve au sud du Diamant. Quinze statues de 2,5 m à la tête inclinée vers la mer représentent les 46 victimes d’un naufrage. Un navire négrier en provenance du golfe de Guinée le 8 avril 1830 a coulé au sud de la Martinique. Olivier Ollon, surveillant de prison, tenait à évoquer ces statuts de pierre : "Ils se trouvent à l’embouchure d’un canal construit par les esclaves au milieu de cette immense baie. Le vent les frappe de plein fouet et fait danser les cocotiers. J’aime l’image produite par cet endroit, c’est à la fois un lieu de recueillement et sauvage avec la forte houle venant du canal de Sainte-Lucie."

Betty Cerveaux-Mayer anime la page Facebook "Réunion du monde". Elle nous présente le moulin à canne à sucre du Chaudron construit en 1735. "Beaucoup de Réunionnais eux-mêmes ne le connaissent pas. Il est pourtant très beau avec ses quatre pales majestueuses." Situé à Saint-Denis, dans la propriété Maureau, dans le quartier de Sainte-Clothilde, il a été reconverti en moulin à vent. Son immense ossature en bois, destinée au broyage, nous rappelle combien les charpentiers de l’époque ont dû travailler dur pour l’élever.

Entre paysage et petites maisons coloniales, Alexandra Albéri, administratrice du groupe "J’aime la Guadeloupe", nous présente la Pointe des Châteaux de Saint-François. Il s’agit d’une petite péninsule située à l'extrémité Est de l'île de Grande-Terre, en Guadeloupe, à 45 km de Pointe-à-Pitre. Tels des châteaux imaginaires, le rocher affronte les rouleaux de l'océan Atlantique. Le paysage offre une grande harmonie découlant de sa formation géologique et de la couche sédimentaire calcaire. Beaucoup comparent ce lieu sauvage, balayé par les vents, à la Bretagne sur lequel aurait poussé des maisons colorées d’inspiration coloniale. "Ça ressemble aussi à la Nouvelle-Orléans", s’amuse Alexandra. En haut des monticules rocheux, une croix monumentale de 10 mètres de haut s’élève vers le ciel. "J’aime ce que dégage le lieu, quelque chose d’insaisissable et d’impressionnant", confie Alexandra.